Macho Macho Man, I’d rather be a…
Cette semaine on a eu droit à une mini tempête médiatique au sujet d’une publicité virale diffusée sur YouTube mettant en vedette le joueur des Canadiens de Montréal, Georges Laraque et de séduisantes nymphettes jouant au hockey bottine pour nous vanter les vertus d’une boisson énergétique alcoolisée (la pub est ici). Publicité banale et insipide comme le sont ces centaines de publicités de bière avec des bébés-big-boobs et des mecs-aux-pecs-impecs : y a de la joie, du party, de la plage, de la séduction, bref, le genre de pub qui oublie de nous dire que finalement le seul attrait physique qu’on risque d’avoir si on consomme trop du produit vanté n’est pas celui présenté à l’écran, mais une énorme bedaine de bière. La communauté blogueuse a largement couvert l’événement et contribué, en la diffusant, à créer le buzz recherché. La tempête a été déclarée par Axelle Beniey, de la Concertation des luttes contre l’exploitation sexuelle, traitant la publicité de dégradante pour les femmes, de mauvaises images pour la jeunesse, bla-bla-bla… La cassette. Je suis tanné de ces sempiternels sermons rétrogrades de féminisme post 68; nous sommes presque en 2010, bordel! Ce qui me fait doublement pomper c’est que nous n’entendons jamais ce genre d’exposé dénonciateur quand on ridiculise des hommes dans des publicités… Un article très intéressant paru en août dans la section « affaires » du Globe And Mail (« Why men in ads are dumb goofy or completely inept » pas de lien disponible, sauf si vous êtes abonné au GAM) parlait d’une nouvelle tendance en publicité, celle de la misandrie (ho! ho! beau mot à chercher dans le dico). La mode est à réaliser des pubs où, dans plein de contextes différents, les hommes sont dépeints comme des incapables, des simplets, des gaffeurs ou de parfaits imbéciles surtout si on les compare directement à leurs épouses. Exemple : un homme a le rhume et se transforme immédiatement en gamin; un homme incapable de se retenir devant une plaque de biscuit préparée pas sa gentille épouse se brûle les doigts et finalement un homme joue le rôle d’un chat qui cherche à se faire nourrir par sa maîtresse (je n’ose imaginer quelle onde de choc celle-ci aurait créée si on avait inversé les rôles des protagonistes!). Ironiquement, ces publicités, toujours selon l’article, plaisent énormément aux femmes qui ne voient rien de bien méchant dans celles-ci. N’est-ce pas là un exemple de double discours? Pour citer un commentaire d’un lecteur sur le blogue de Patrick Lagacé à ce sujet : « si ça avait été Alexandra Wosniak qui jouait au tennis avec des Cupidons en boxers, ça aurait été tout à fait correct.» Deux poids, deux mesures. Comme le principe de la discrimination positive (comment de la discrimination peut-elle être positive!!!). La publicité dans laquelle Laraque joue est une mauvaise publicité. Point. Il ne faut rien chercher de plus que ça. L’exploitation du corps de la femme n’y est pas plus évidente que dans des pubs du même genre. Ni plus, ni moins. Madame Beniey, choisissez vos combats, celui-là n’en vaut pas la peine.
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Par nous, pour nous.
« Louise, citoyenne de Saguenay qui cherche toujours des bijoux uniques rencontrera Luc, bijoutier artisanal, qui lui, songe à changer ses fenêtres, pourra discuter avec Nathalie, fabricante de produits en aluminium, qui elle, fera la connaissance de Denis, toujours à l’affût de découvertes culinaires, et il sera surpris d’apprendre que Jean, éleveur bio, puisse offir ce type de produit ici, dans sa ville. À la Foire Commerciale de Saguenay, venez découvrir des produits faits par nous, pour nous. » Petit texte accompagnant la publicité journal pour l’événement qui se déroulera dans le hangar de la zone portuaire de l’arrondissement de Chicoutimi ce week-end. Une foire commerciale qui se rapproche de la façon de faire du commerce d’une époque révolue : celui d’avoir un lien direct avec le fabricant. C’est d’ailleurs l’image qui m’a inspiré le logo créé pour l’occasion : deux personnes qui fabriquent un truc pour un couple. Très intéressant comme formule cette foire, vous ne trouvez pas? À l’heure où les entreprises crient à l’injustice de la compétition mondiale qui vient d’internet ou celle des magasins grande surface, à l’heure où la consommation de proximité est un geste à valeur environnementale élevée, à l’heure, finalement, des campagnes d’achats chez nous, nous arrive un projet plus réaliste que théorique : celui de faire rencontrer des consommateurs et des fabricants locaux. Sans intermédiaire. Sans vendeur. Aujourd’hui, la seule façon qu’à une entreprise de se sortir du joug du prix, est d’offrir une valeur supplémentaire à son produit et service. Le prix peut en être une, mais il sera toujours contesté, négocié, et finalement réduit par un concurrent pas nécessairement près de chez vous. Le prix est une valeur pauvre (mmm, beau slogan…). Je veux bien encourager les gens de chez nous. On a tous cette honnête réflexion. Personne n’est contre la vertu. Mais l’idée de payer plus cher est un frein naturel et normal. À produit égal, le meilleur prix l’emportera toujours. C’est la dure loi du marché. La seule façon de s’en sortir, pour une entreprise, est de s’assurer que sa valeur ajoutée est non-négociable, introuvable ailleurs et difficilement copiable. Facile à dire devant mon écran, les mains sur mon clavier, vous vous dites. Oui et non. Je suis graphiste et publicitaire. Il existe à proximité de mon bureau des boîtes de pub connues pleines de talents, d’autres moins bonnes chargeant des pinotes et tout un chacun a sous la main un beau-frère capable de photoshoper tout ce qui bouge, s’improvisant artiste et prêt à vous créer un truc pas cher. J’ai aussi des clients qui ont le poids, le marché et les budgets pour se choisir une plus grosse agence dans une plus grande ville que Chicoutimi. Finalement, il existe des sites internet où il vous est loisible de télécharger un logo, un canevas de brochure ou de site internet pour moins de 100 $. Ça m’empêche de dormir? Non. Pas une miette. Ce qui m’empêche de dormir, c’est de chercher la meilleure façon pour mon client de se démarquer. Et de lui charger ce que cela vaut. Point. Je n’ai aucun contrôle sur le prix de mes concurrents, aucun sur leurs idées et encore moins sur leurs partenaires d’affaires. Aucun. Mais, eux non plus, ils ne l’ont pas sur mes trucs. Conclusion mon Marco? Travaille plus fort, gratte-toi la tête encore plus, botte-toi le cul et sois gentil avec tes clients. Ça devrait bien aller.
> La Foire commerciale de Saguenay – Samedi, 10 et dimanche, 11 octobre, de 10h à 18h – Hangar du Vieux-Port de Chicoutimi
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Tck Tck Tck Tck.
Un petit bijou de vidéo sur une reprise d’une chanson pas mal cool de Midnight Oil. Un beau mélange de plan continu et d’animation doublé d’un graphisme parfait qui donne un résultat super sharp. J’aime spécialement l’animation du cadran, l’intégration des logos et des choix typographiques. Conçu pour l’organisme Time For Climate Justice, le clip ainsi que la chanson sont distribués gratuitement sur la toile (en cliquant sur le site, vous y avez accès). Même si la chanson date de 1987, elle est toujours et plus que jamais brûlante (!) d’actualité. Appréciez malgré le discours déprimant…
> merci à Denis Claveau, via Facebook, pour le lien
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Bye Anne, A+.
« On rencontre dans une vie des milliers de gens, des gens semblables, des gens différents… » C’est par ce texte que je concluais le film « Le rêve est une seconde vie ». Un vidéo que j’ai réalisé pour CORAMH qui parlait du dur quotidien des personnes atteintes ou avec des proches atteints de maladies héréditaires orphelines. CORAMH, c’est un organisme auquel je crois énormément. Avec des gens incroyables qui portent à bout de bras une cause tout aussi importante qu’eux. On rencontre dans une vie des gens incroyables. Des gens comme Anne Vigneault. Anne qui était à la barre de CORAMH depuis que je connais l’organisme. Anne qui quitte. Pour Montréal. Quand je lui ai parlé vendredi dernier, pour lui retourner son appel de la veille, j’étais loin de me de douter de cette nouvelle. Je m’attendais plutôt à me faire réprimander de mon retard sur un de ses dossiers. Quand Anne m’a annoncé qu’elle quittait la région, j’ai eu un flash, le même qu’on est supposé ressentir à sa mort : l’espace d’un instant, j’ai revu la relation affaires/amitié/engagement qu’a généré notre rencontre qui remonte à 6 ans. Je vais vous avouer un truc. Quand Anne m’a approché pour réaliser ce film basé sur des témoignages de gens aux prises avec une maladie héréditaire, j’ai accepté même si je n’avais jamais réalisé ce genre de truc auparavant. À part de la pub, mon expérience de réalisation se résumait à très peu. Mais je voulais le faire et Anne et sa gang aussi. Alors, j’ai dit oui. Le film a vieilli, certes, mais il passe encore le message. Quand je le revois, il me trouble encore. Ces 22 heures d’entrevues pour 22 minutes de film. 22 heures de confidences à vif. De tripes. De coeurs. De douleurs. Lorsqu’il fut le temps de conclure le film, j’avais pondu un texte de mes propres entrailles ou de mes propres souffrances. Un texte que j’ai moi-même narré dans le film à la demande de Anne. Un texte pour lequel Anne m’avait envoyé un courriel qui disait « qu’elle avait de la chance de m’avoir croisé » dans sa vie. Anne. Elle est comme ça, Anne. Un coeur gros comme la cause pour laquelle elle s’est battue autant d’années. Un coeur qui ne calculait pas ses heures. Dure, dure réalité des organismes communautaires. Des heures sans horaire. À travailler, oui. Mais à vivre surtout. Vivre des réalités, des vies et des morts comme peu de nous le feront dans toute une vie. Anne qui comprenait ces gens, qui compatissait avec eux, qui se battait pour faire connaître leur quotidien pas toujours facile. Anne quitte pour Montréal relever de nouveaux défis. Le Saguenay perd une battante, une femme de foi, mais Montréal gagne une femme intelligente, ouverte sur le monde qui l’entoure. Je suis privilégié de t’avoir croisé, Anne. Sans toi, je n’aurais pas fait ce film. Sans toi, je n’aurais pas vécu ces moments à la fois de bonheur et de tristesse. Sans toi, un paquet de gens seraient encore dans l’ignorance par rapport à leur situation. Sans toi, des familles ne comprendraient pas toute la souffrance qu’elles ont pu subir. Sans toi, les campagnes que j’ai créées pour CORAMH n’auraient jamais vu le jour. On attribue trop souvent le mérite aux concepteurs des messages, mais une cliente comme toi, nous pousse à aller plus loin. On ne va jamais plus loin que le client nous le permet. Anne qui remerciait toujours en disant à quel point elle était contente de travailler avec moi. Alors que je ne faisais que mon job. C’est dur de se faire engueuler par un client, mais tout autant difficile de se faire cajoler. Anne, je garderai en souvenir de toi nos fous rires lors de dîners/réunions, nos ragots qu’on aimait colporter au téléphone et nos récits de voyage personnels. Je te souhaite tout le succès que tu mérites dans tes nouvelles fonctions. Merci. A+.
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It’s not personal, Sonny. It’s strictly business.
C’est ce que Michael Corleone répond à Tom Hagen quand il lui annonce son intention de tuer le flic corrompu McClusley lors d’un repas au restaurant dans le film The Godfather (Le Parrain). Je ne vous ai jamais dit à quel point je suis un fan de ce classique du cinéma. Je l’ai vu des dizaines et des dizaines de fois, sans m’en lasser, je ne peux pas passer une année sans me lancer dans la trilogie complète. C’est mon rituel. Quand Michael lance cette phrase, il convainc son demi-frère, Tom, que sa décision d’abattre le ripou est basée sur une réflexion rationnelle et non émotionnelle. Business, Tom. Strickly business. On connaît la suite. Bullshit. Le mot business m’horripile. Il est défini par des codes qui n’ont plus leur place maintenant. Strickly business. No Way. Ne me mentez pas. Cette vieille rengaine de baser ses actions uniquement sur du tangible, sur des modèles d’affaires, des codes est dépassée pour moi. On ne fait pas des affaires avec des machines. On fait des affaires avec des personnes. Qui dit personne, dit relation personnelle. Lâchez-moi avec les relations d’affaires, uniquement basées sur des modèles économiques stricts. Qui dit personne humaine, dit sentiment humain. Réduire ses décisions d’affaires à des colonnes de chiffres sans tenir compte des gens qui représentent ces chiffres m’est très difficile à imaginer. Attention, je n’ai rien de la gauche. Je ne suis pas un socialiste, ni un communiste, encore moins un syndicaliste. Je suis assez de droite. Capitaliste. J’aime la liberté en affaires. J’aime les entreprises novatrices. J’aime les gars et femmes qui vivent de leurs passions, ces gens aux idées vivifiantes qui mettent tous ce qu’ils ont dans la vie pour créer une entreprise et de réaliser leurs rêves. Je ne suis pas un fan des subventions, à moins d’une justification extrême, en s’assurant de ne pas nuire au marché naturel qui s’est bâti seul. Quand Michael dit que c’est business seulement, il ment. Il a un sentiment de vengeance en lui. Venger son père. Se venger de McClusley qui l’avait malmené devant l’hôpital où son père était gardé. Business? Pan tout’. Et c’est normal. Quand je travaille avec un client sur un projet, je m’intéresse bien plus à ce client qu’à son besoin primaire de communiquer. Je m’intéresse à lui bien avant son produit. Dans ma philosophie, je ne peux bien saisir un mandat, sans bien connaître le client. Son ADN. Et ça ne s’arrête pas à ce qu’il fait dans la vie, mais qui il est vraiment. En apprendre sur les gens est aussi important que de tout savoir le pedigree d’une entreprise. Être émotif en relation d’affaires n’est pas une faiblesse, mais une ouverture d’esprit qui donne des résultats constructifs. Je suis un intermédiaire entre deux humains. Une entreprise menée par des humains qui offrent un produit à d’autres humains. Pas une business vers un marché cible. Si je réussis à connecter les deux personnes et faire vivre une rencontre intéressante et constructive, je réussis à bâtir une relation basée sur des valeurs. Si mon unique but est de dire à A que B est moins cher que C et meilleur que D, je ne vais pas très loin. La magie des réseaux sociaux est d’avoir permis à une entreprise d’être plus près de sa clientèle, en la rendant disponible et accessible, qu’importe la grosseur de cette entreprise. Créer des relations c’est s’assurer d’une meilleure compréhension lors d’une crise (comme une crise économique, par exemple) avec ses clients. C’est lorsque ton client vit une période difficile et qu’il a besoin de toi que cette relation, basée sur le respect mutuel, devient importante. Quand les chiffres deviennent accessoires. It’s not business, Sonny. It’s strickly personal. Personal.
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Prêt pour la « vraie » vie?
Vendredi dernier, je recevais à mon bureau une jeune étudiante du Cégep de Jonquière inscrite en ATM (Arts et Technologie des Médias). Sa mère qui travaille dans le milieu des médias m’avait référé afin de lui brosser un tableau assez réel de la profession de créateur publicitaire. Sous forme d’entrevue, j’ai répondu aux questions à la fois candides et pertinentes de mon apprentie journaliste. Je dis candide avec beaucoup de respect, car je trouve que la jeunesse a cette qualité, souvent hélas de moins en moins véhiculée aujourd’hui, d’être animé par cette petite flamme qu’on appelle la passion. Si pour elle, cette entrevue avait pour but de mieux orienter son choix de carrière en optant pour la création publicitaire (au lieu d’animateur/ journaliste/ technicienne/ etc.), pour moi ce fut un bel exercice d’introspection. Même si ce blogue me permet assez souvent d’écrire des réflexions sur le sujet, le fait de répondre à des questions précises à quelqu’un dont le but est de suivre mes traces était un exercice différent pas mal intéressant. Dans ce genre de situation, je suis assez volubile. J’adore parler de ce que je fais dans la vie. Je me sens surtout privilégié d’exercer un métier que j’adore qui me permet de bien gagner ma vie tout en me réalisant personnellement. Je sais que c’est plutôt cliché comme affirmation, mais le fait demeure qu’autour de soi, trop peu de gens sont heureux de leurs sort professionnel, comptant les jours comme des détenus jusqu’à leur libération (lire retraite). Ce que j’ai particulièrement apprécié dans cette rencontre, c’est surtout le fait que cette étudiante décide de rencontrer quelqu’un comme moi qui travaille tous les jours dans le domaine afin de lui brosser un portrait juste et précis du quotidien qui l’attend à la fin de son cours. Non pas que je doute que ses professeurs le fassent, mais la pratique est souvent loin de l’apprentissage. Je pense qu’il est impensable de choisir une formation collégiale ou universitaire et de ne pas faire plusieurs stages en milieu de travail, ne serait-ce qu’au début de simples stages d’observation. Dans une autre vie professionnelle, j’ai eu l’occasion de prendre des stagiaires d’ATM, en fin de formation. Toutes les fois, je suis arrivé à la même conclusion qu’eux : pourquoi avoir attendu à la fin de leur formation pour leur faire découvrir la réalité qui les attendait? Trois ans en vase clos, dans une classe douillette, à apprendre « théoriquement » la profession, parce que la vraie vie est la plupart du temps bien différente des grandes théories. Je me souviens surtout de stagiaires gonflés à bloc, persuadés d’être prêts à faire flèches de tout bois, se dégonfler tout doucement pour se rendre compte que le métier n’était peut-être pas ce à quoi ils s’attendaient. Pas plaisant ça. Et surtout évitable. Je pense que les étudiants gagnent à se frotter au milieu, à mieux saisir leur futur, à mieux challenger leurs professeurs au retour d’un stage en leur soumettant des questions plus précises de manière à réorienter le tir; et c’est finalement le métier qui gagne, en fin de compte, à mieux former sa relève.
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On parle de goût, pas dégout.
Ça arrive à l’occasion. Pas souvent, mais juste assez pour en parler ici. Je campe une situation tout à faite fictive. Dans celle çi, je présente la maquette d’un projet à un client, celui-ci réagit de cette façon : il aime bien le concept, l’idée générale, le slogan, le body copy, tout baigne, MAIS je vois bien que quelque chose le titille. Il me dit qu’il déteste la couleur dominante. Ce n’est pas dans sa palette. Il n’aime pas. Et il n’en démord pas. « Ce n’est pas beau! » Comme un enfant qui dit : « C’est pas bon! » Tu as beau expliquer que c’est une couleur très tendance, saisonnière, représentative, contrastante, différente, complémentaire, tendre, pimpante, apaisante, tonique, froide, chaude, distinctive, full 80’s, full 70’s, full mode-genre-truc… « Ce n’est pas beau! » Point. Il ne dit pas que cette couleur est inappropriée, ni qu’elle manque de contraste. Non. Il n’aime pas. Point. En fait, il serait quasiment prêt à saborder le concept tellement il la déteste. L’idée sort moins bien sur cette couleur, bla-bla, le slogan est moins bon sur cette couleur, bla-bla, bref, y a vraiment rien qui va. Uniquement par rapport à ses goûts personnels. Pas de logique. Pur sentiment. On parle de couleur, mais il va de même pour la typographie. « Haaaa, pas en italique! Je déteste les italiques… C’est laid des italiques! C’est moche des italiques! C’est croche des italiques! » « Pourquoi utilises-tu des italiques? Ce n’est pas beau! » Beau? Moi, je trouve le contraire. J’aime bien les italiques. C’est pourtant utile des italiques. Ça danse des italiques. Ça s’exprime des italiques. Ç’est délicat. Instable. Charmant. Plein de qualités. Mais ça ne passe pas. Les arguments techniques, professionnels, rationnels, historiques et métaphysiques n’ébranlent pas la haine que l’on peut porter à ce style typographique. Rien à faire. Le dégoût l’emporte. « Et mon logo, il pourrait être plus gros? Vraiment très gros! Parce que j’ai lu le livre de monsieur Truc – 101 trucs publicitaires – et il le dit, lui, à la page 64, que le logo n’est jamais assez gros… » Heu. Je suis bouche bée là. « Vous ne l’avez pas lu? » Non désolé, seulement feuilleté. Ce n’est pas mon truc, les trucs de M. Trucs. Mais, si c’est écrit, c’est donc vrai, non? Oui, comme ce blogue. « Mais vous n’êtes pas M. Truc! » Revenons à notre maquette, maintenant que je l’ai modifiée à votre goût. Pardon? Vous me demandez c’est quoi ces minuscules bidules autour de votre logo ? C’est votre concept, monsieur. J’ai pensé vous faire plaisir, alors j’ai mis votre logo gros comme la page et j’ai mis un tout petit concept, gros comme un pois (mais pas vert, car vous trouvez que c’est laid, le vert), minuscule, microscopique, de façon à ne pas nuire à votre logo, j’ai mis le slogan en minuscule Arial (je n’ai pas osé mettre Helvetica…). Place au logo! Comme Monsieur Truc le dit. En page 64. 101 trucs publicitaires. L’évangile selon Truc. Les recettes publicitaires de Truc. Ajoutez seulement de l’eau. Concept en poudre. Évitez d’inhaler. Peut vous donner une apparence normale, parfaitement comme tout le monde. Pour être certain de ne pas vous démarquer. N’est-ce pas qu’il est bien votre logo comme ça dans la page. Il prend toute la place et comme ça, tout le monde c’est que c’est vous qui annoncez. Génial non? Vous serez vu. C’est ce qu’on veut est être vu, non? . Pas nécessairement compris ou apprécié, mais vu.
MAJ
Après les commentaires reçus sur Facebook à la suite de la parution de ce billet (j’aurais aimé avoir les commentaires ici, mais l’important c’est d’en avoir…), j’ai senti le besoin d’approfondir ce billet. C’est vachement drôle les perceptions. Je n’ai pas eu l’impression de me lamenter dans ce billet, mais plutôt de tenter d’expliquer uniquement qu’un client peut avoir de la difficulté (quelques fois) à prendre un certain recul par rapport à son entreprise. Le fait d’engager un gars comme moi est déjà une ouverture et surtout une manière d’accepter de se faire dire par quelqu’un d’autre qu’on serait mieux de se présenter de telle ou telle façon. Et de faire confiance. C’est surtout l’aspect majeur que je voulais que l’on comprenne de ce billet. Surtout pas que je considère mes clients comme des plaies qui agissent en bornés. J’ai trop de respect pour eux pour ça. Ce qui est difficile dans un métier comme le mien est de faire accepter des idées qui ne sont pas là pour faire plaisir ou plaire à mon client, mais bien aux clients de mes clients. C’est une nuance majeure. J’ai déjà présenté à un client un projet monté pour des adolescents. Lors du dévoilement de mon créatif, le client a eu une réaction intéressante : il m’a dit qu’il n’aimait pas vraiment le style de graphisme utilisé, mais qu’il considérait que c’était normal puisqu’il avait 55 ans et donc très loin du marché cible auquel cette production s’adressait. Pas facile comme exercice, mais tellement important et promordial. C’est ce que je pense qui fait toute la différence. Je ne fais pas de la pub ou du design pour moi, ni pour mes clients, mais pour les clients de mes clients. Il faut être en mesure de faire abstraction de ses goûts personnels, moi le premier, et penser en fonction de notre clientèle visée. Voilà, pour la mise à jour.
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Mille Lieux.
Ouf. Mon dernier billet remonte à plus d’une semaine… Pas eu beaucoup de temps à moi dernièrement; comme j’ai beaucoup de dossiers à mener de front, je néglige un peu cet espace. Parlons de l’un de ces mandats. On m’a confié la recherche du nom et le design du logo de ce qu’on appelait avant Le Village de Sécurité routière. Un parc thématique pour enfant dont la particularité était d’avoir reproduit un village miniature dans lequel les enfants pouvaient rouler en voiturette ou vélo. Cet endroit avait connu son apogée dans les années 80 pour tomber vétuste dans la dernière décennie. Je connaissais très bien l’endroit pour y avoir travaillé l’été de mes 16 ans. Mon deuxième emploi à vie. J’en ai gardé des souvenirs ineffaçables : emploi d’été parfait, à l’extérieur, avec 12 animatrices (remarquez le féminin!!!), et un horaire de semaine. On gagnait peu, mais le travail était assez facile. Bref, disons que j’étais en terrain connu. Le parc sera rénové l’an prochain pour lui donner une seconde vie et une nouvelle vocation : un parc voué à une clientèle plus jeune (0-12 ans) et composé de mondes différents : le labyrinthe, la forêt, le village, les jeux d’eau, etc. Des mondes laissant place à l’imaginaire des enfants. Au lieu d’avoir développé des endroits précis, les concepteurs ont préféré laisser les jeunes explorer eux-mêmes et décider de la vocation finale des habitats. Magnifiquement conçu par le bureau Daniel Arbour & Associés et piloté par la talentueuse Dominique Baril, le parc devrait recevoir ses premiers clients à l’automne 2010. Comme je le mentionnais plus haut, mon mandat était de baptiser le nouveau parc; j’ai opté pour « Mille Lieux ». Inspiré par les mondes qui le composent, le nom a un côté magique digne des contes de fées et le double sens de le placer géographiquement (le parc se situe au coeur du Parc de la colline). « Mille Lieux » renforce la notion d’imagination, en exagérant le nombre de possibilités que représentent les mondes proposés. Le design du logo est venu tout simplement en observant les plans : chacune des lettres devenant un objet représentatif du parc : le M qui fait une maison, les L qui font la forêt, etc. Le logo se veut très ludique et amplifie la notion de jeu. Les couleurs utilisées sont pures et simples, des couleurs de base utilisées par les enfants. Belle initiative pour la Ville de Saguenay que de créer cet univers pour les plus jeunes enfants, à la fois ceux de ces citoyens, mais ceux des touristes en visite. Il y a avait d’ailleurs un manque à ce niveau dans l’offre touristique régionale. À noter que le parc sera ouvert été comme hiver…
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Vision 2025.
Vendredi, j’assistais au Forum Vision 2025, forum sur l’enjeu de la relance économique régionale du Saguenay-Lac-Saint-Jean. Une activité organisée par le centre de recherche sur le développement territorial de l’UQAC. En fait, j’étais panelliste avec 5 autres intervenants à la table ronde sur « la mise en valeur du capital de créativité régional ». Bien que le forum fût un exercice très théorique, j’ai aimé l’expérience et apprécié échanger avec des gens de différents milieux sur le sujet fascinant qu’est la créativité. Voici le texte que j’avais préparé pour l’occasion…
Quand j’étais étudiant en design graphique à l’UQAM, mes professeurs venaient presque tous d’Europe. Ce qu’on m’enseignait était la façon de faire européenne en matière d’idéation : une façon de faire basée sur la créativité des idées et non sur leur faisabilité. Il y avait là une grande nuance. Alors que les autres universités préparaient des designers pratiquants, beaucoup plus bercés par des principes américains, l’UQAM, elle, forçait ses étudiants à se questionner, à trouver des idées nouvelles, sans se badrer des contraintes d’essayer de les réaliser. Libéré de cette emprise, naissaient des idées quelques fois farfelues, impossibles et parfois vertigineuses, mais rarement ennuyantes. Je suis avant tout un gars de pub. Un gars qui vous vend des trucs. Pas les siennes, celles de ses clients. Tous les jours, je me creuse la tête pour trouver une idée qui va me permettre de vous présenter mon client sous son meilleur jour. Tous les jours, je cherche une façon de démarquer mes clients par rapport à sa concurrence qu’elle soit locale ou nationale. Chaque jour, finalement, je suis imputable aux idées que je soumets à mes clients. C’est ma seule planche de salut. La créativité est mon leitmotiv. Mon Do It Or Die. C’est mon quotidien. Le dossier le plus difficile à réaliser est celui dont le budget n’a pas d’importance, dont les délais sont flous et les conséquences de retard absentes. L’ennemi de la créativité, c’est la liberté totale. De la contrainte naît la créativité. Et avouez que des contraintes, dans une région comme la nôtre, c’est assez facile à trouver. Il faut toujours faire plus avec moins. Il faut être en mesure de propulser nos forces et de combler nos faiblesses. Prenons par exemple le tourisme : pourquoi s’acharne-t’-on à jouer dans les mêmes plates-bandes que les autres régions. On n’arrête pas de nous dire que nos étés sont pourris, mais que notre hiver est époustouflant et que ça nous distingue, pour quoi ne pas faire de l’hiver, notre principale destination et laissez l’été aux autres. Pourquoi qu’à chaque fois qu’un entrepreneur nous épate avec un nouveau produit, on se précipite à faire la même chose pour être certain que le marché se dilue et devient obsolète. Pourquoi faut-il toujours que nos idées soient calquées sur des idées d’ailleurs. Pourquoi quand tout le monde zig, on ne zag pas? Il faut oser. Les gens qui réussissent à redéfinir leur profession, à sortir des sentiers battus, à créer des nouvelles façons de voir et de faire, le font souvent à contre courant des marchés, des demandes et des modes. Il faut cesser d’avoir peur d’être différent. Il faut cesser d’avoir peur des nouvelles idées. Il faut cesser d’avoir peur d’avoir peur. Vous me parlez de créativité, je vous parlerai de travail. Laissez-moi vous louanger les vertus de la sueur de bras. Laissez-moi surtout la chance de redonner au mot « labeur » ses lettres de noblesse. Parce que l’on a trop souvent dénigré, ces dernières années, les gens qui travaillent trop; vous comprendrez ici que le mot trop est entre guillemets. Parce que notre société de loisirs a décidé que la notion de travail ne devrait plus occuper la place qui lui revient. On a droit à une belle campagne qui nous dit qu’ici c’est possible, il faudrait en faire une aussi qui dit que travailler plus, c’est aussi possible et ça rapporte. Il faut valoriser les initiatives. Notre lourd passé syndical nous a fait rouler trop longtemps sur la voie de service; prenons notre place sur la grand-route et mettons-nous au travail. Félicitons les initiatives. Il faut se responsabiliser. J’adhère au principe de 1 % d’inspiration pour 99 % de transpiration. Des idées c’est assez facile à trouver, des bonnes, ça prend pas mal plus de temps. La région est-elle prête à mettre autant d’effort à s’en sortir? La région est-elle prête à prendre des risques? À se mettre à penser autrement? À se mettre à travailler plus fort? Rassurez-moi.
> Image générée par le site Mad Men Yourself – où il est possible de vous transformer en un personnage de ma série télé préférée.