Chroniques sénégalaises 02- «Je serai candidat»


Voilà c’est officiel, Youssou en fera partie.Le chanteur sénégalais Youssou Ndour a annoncé lundi soir qu’il sera candidat à l’élection présidentielle de février au Sénégal. Ce n’était plus un secret pour personne, à la fin novembre il avait mis la puce à l’oreille aux journalistes en mettant en veilleuse sa carrière de chanteur pour se consacrer à des projets d’ordre politique.Ils seront plus d’une vingtaine de candidats à faire la lutte au président sortant Abdoulaye Wade. Agé de 85 ans, l’homme est au pouvoir depuis 2000. Il a été réélu en 2007 pour cinq ans et se représente pour un nouveau mandat de sept ans après une modification de la Constitution rétablissant le septennat. Le pouvoir est une drogue forte. Surtout en Afrique.

Comme je ne suis pas encore débarqué (j’écris ce billet depuis l’aéroport Charles-de-Gaulle) je ne suis pas en mesure de vous parler de la perception directe des Sénégalais, par rapport à la candidature de N’Dour. Mais déjà, sur les réseaux sociaux, on s’enflamme de part et d’autres. J’ai d’ailleurs été surpris de lire les arguments des détracteurs, tout comme que ceux de ses fans.

Pour certains Sénégalais, la fonction de président est une tâche beaucoup trop sérieuse pour la confier à un griot (en Afrique, personne appartenant à la caste des poètes et musiciens, héritiers de la culture orale). On reproche à N’Dour de ne pas avoir d’expérience et surtout aucun diplôme. On voit aussi d’un mauvais œil, le fait qu’il soit riche. C’est drôle de lire ce genre de truc, alors qu’on vit la même chose chez nous. La crainte des gens riches…

Dans la presse en ligne dakaroise, on dit que sa décision de se présenter est plus populaire à l’extérieur qu’à l’intérieur du pays. Il faut dire que le chanteur à toujours eu bonne presse au niveau international par rapport, à ses projets de micro-crédit et de chaînes spécialisées jumelés à ses multiples spectacles bénéfices.

Bien hâte de sentir le pouls de la population à ce sujet…

Iphonetrip.com
Dans ce périple, j’avais fait le choix de ne pas apporter mon portable, mais uniquement mon iPad. Pour me divertir, bien sûr, mais avant tout pour écrire ce blogue. Lors de mes recherches sur le net pour trouver une façon de pouvoir me connecter via un réseau 3G, je suis tombé sur un site (iphonetrip.com) qui vantait la possibilité de se connecter partout dans le monde pour la modique somme de 7,95 $ par jour. À ce prix-là je me suis dit que le risque en valait la chandelle. J’ai commandé ma carte micro-sim en spécifiant mes dates de départs et lieux visités, un dimanche apres-midi. Jeudi matin suivant, FedEx arrivait avec l’enveloppe contenant le Saint-Graal. Comme il m’était impossible de savoir si cela fonctionnait avant mon arrivée à Paris, j’ai suivi les indications et remplacer ma carte Rogers par la nouvelle. En débarquant à CDG, mon iPad s’est automatiquement connecté et j’ai reçu un courriel de confirmation de Iphonetrip.com. Bon je sais que le vrai test sera lors de mon entrée en brousse, mais je peux vous dire que dès maintenant, cette option fera dorénavant partie de mes essentiels lors de mes prochains voyages. À suivre.

> Crédit-photo : REUTERS/Valentin Flauraud

Chroniques sénégalaises 01- le retour


Voilà. Ma valise est fermée. Pleine à craquer. J’ai dû la peser, défaire, peser, refaire, peser, prioriser, repeser pour arriver au nombre de kilos permis. Faut dire qu’avec une tente, un sac de couchage et tous ces trucs aussi banals, mais plus qu’essentiels, comme du papier-cul, il te reste peu de place pour tes affaires personnelles. Que l’essentiel. Depuis plusieurs jours déjà, sur la page privée de Facebook réservée au stage, les étudiants se lamentent sur le dépassement de poids ou leur manque d’espace de leurs valises. Difficile de laisser derrière soi ce confort nord-americain. Difficile d’abandonner nos habitudes de riches. Ce bien-être acquis sans trop d’effort. Disons que c’est notre toute première épreuve. Si on peut appeler ça ainsi. Misère des riches.

Le danger de comparer
Quand je voyage je n’aime pas retourner aux mêmes endroits. Si je le fais, je tente par tous les moyens de ne pas visiter les mêmes lieux, choisir les mêmes restaurants. Je déteste la routine. Au risque de me tromper. Pourquoi? Premièrement, j’aime beaucoup l’imprévu, j’aime voir ce que le destin me réserve et comme il est rarement possible de recréer une première expérience, vaut mieux garder ce souvenir que de tenter en vain de recréer ces hasards de la vie. Comme manger à ce restaurant découvert par dépit parce qu’on s’est fait prendre par la pluie. Ce même restaurant auquel on aurait jamais songé dans une autre situation. Y retourner, briserait ce charme créé pour l’occasion. Deuxièmement, y a tellement de trucs à voir, faire, manger, lire que je ne comprends pas l’idée de refaire ce qui a déjà été fait. La jouissance de la découverte l’emportera toujours sur le confort du déjà-vu. Et finalement, n’est-ce pas l’essentiel-même du voyage que de se laisser aller et de ne surtout pas se blaser?

Mais voilà que je retourne au Sénégal. Dans ce même petit village qu’est Thiaré. Dans ce même dispensaire de santé, un an plus tard, presque jour pour jour. Avec des étudiants et des bénévoles. Le danger de refaire les mêmes gestes me guette et ça me fait peur. Vigilance.

Lego vs. L’égo
De 18 intervenants, l’an passé, notre groupe est passé à 31 cette année. Avec tout ce que ça comporte comme logistique. Comme les infrastructures d’accueil demeurent les mêmes, ce sont les personnes qui devront s’adapter aux lieux. Mais tout ça, c’est physique et mathématique et par le fait même facile à régler. Facile à matérialiser. Assoir et servir à bouffer à plus de personnes, comme pour les faire dormir à quelque part, ça ne représente pas un grand défi. Un jeu d’enfant. Comme des blocs Lego.

Ça sera différent pour notre bloc personnel, l’égo. Chacun des participants débarqueront avec des idées, des aspirations et surtout un bagage de vie très différents. Les étudiants en soins infirmiers, dont quelques-uns en seront à leur baptême de l’air, représentent tout de même un bloc homogène. Ils sont avant tout, la raison même pour laquelle ce stage est organisé. Habitués de vivre en gang, la notion de promiscuité n’est pas un truc qui les dérangera, au contraire… Il y va de même pour les enseignantes; oui, ce sera dans un cadre différent, mais leur travail de soutien et d’encadrement demeurera le même. Pour les bénévoles, dont je fais partie, c’est autre paire de manches. Ils devront s’adapter à un groupe de jeunes, vivre différemment et surtout s’adapter à vivre en groupe, avec des gens qu’ils connaissent à peine. Il ne faut pas perdre de vue, que cette expérience de vie qu’ils s’apprêtent de réaliser est un stage humanitaire et non un voyage. Nuance subtile, mais majeure. Tout ce que nous accomplirons, là-bas sera toujours dicté en fonction de notre mission première, celle d’aider. Nous ne serons des touristes que par notre couleur de peau et nos grands yeux, mais surtout pas par nos idées préconçues. Nos découvertes se feront dans un cadre humanitaire, ce qui devrait se matérialiser par de l’ouverture sur les autres, et surtout oublier notre petite personne pour l’espace de trois semaines. À des années-lumières d’Occupation Double…

Le monde est petit. Très très petit.

Les Québécois n’auront jamais autant voyagé. En scrutant les données de Statistiques Canada, la courbe est exponentielle. Nous sommes toujours prêts à décoller. Y a pas une semaine où tu n’entends pas quelqu’un qui parle de son imminent départ dans des pays avec des noms qu’il fallait faire semblant de connaître il y pas si longtemps. On voyage de plus en plus jeune, en famille ou en couple et on voyage de plus en plus loin. Les périples, jadis réservés aux grands explorateurs sont maintenant banalisés par les tours opérateurs qui les rendent accessibles à tout le monde en autocar climatisé. Il y a plus vraiment de destinations qui nous impressionnent. On ne parle plus de Tombouctou comme le bout du monde. On va en Europe comme on allait à Old Orchard dans les années 70. Les voyages dans le sud sont devenus de banals week-ends dont on se confesse quasiment. « Tu arrives de voyage? » – Non, non je suis seulement allé 10 jours à Cuba. C’est devenu banal. Anodin.

Et la bouffe? Haaaa la bouffe. On entre dans le plus simple IGA de quartier pour s’acheter quinoa, manioc, farine de banane plantain. On cuisine le monde de plus en plus quotidiennement. Notre trio carotte/patate/navet est devenu moribond et l’offre s’est multipliée pour nous offrir des légumes de champs du monde entier. L’expression légumes de terre est devenue légumes de Terre. Légumes d’ailleurs qu’on réussit maintenant à cultiver très bien, ici même. L’exotisme ordinaire. On peut manger exotique bio, près de chez nous. J’écris exotique et je me fais rigoler, car ce mot n’a plus la même saveur que jadis. Notre alimentation a tellement changé et évolué qu’on peut difficilement parler de bouffe d’ailleurs. Beaucoup de produits importés font partie intégrante de notre alimentation quotidienne. Et ce n’est même plus réservé à une élite. Ni à une classe plus riche. Ricardo, Faita, Pinard et compagnie ont réussi, avec leurs émissions et livres, à métamorphoser la cuisine québécoise et la rendre multiculturelle en démocratisant celle-ci. Notre table est multiculturelle. Nous bouffons le monde.

Nous n’avons jamais été aussi informés sur les grands conflits mondiaux. Nous avons suivi les dernières grandes révolutions sur Twitter. En direct. Nous avons vécu le printemps arabe, dans le confort de nos foyers. Nous avons pu suivre les élections tunisiennes et en parler parce que sa couverture par les médias nous a été offerte sur le web. Nous nous nourrissons de sources d’informations diverses et mondiales. Les points de vue sont de plus en plus diversifiés. Nous avons maintenant l’opportunité de lire comment l’orient perçoit l’occident. Nous extrapolons moins. Des idées d’ailleurs influencent les nôtres. Un mouvement comme Occupons machin s’exporte, s’importe, comme un fruit. Nous vivons le village Global. Nous sommes mondiaux. Les barrières tombent.

Nous vivons une époque formidable, comme j’aime le dire si souvent. Une époque mondialisée.

Le monde est petit, mais plus nous. Nous avons grandi de ces expériences multiculturelles. Nous ne sommes plus des étrangers. Imbibés de culture, nous sommes devenus des citoyens du monde.

Pourtant, quand Khady du Sénégal finira ses études au Saguenay, c’est dans une autre ville, peut-être province et même pays qu’elle ira pratiquer.

Pas qu’elle n’aime pas le Saguenay, ni le Québec. Elle a quand même choisi de s’y établir pas seulement le temps de ses études, mais avec le but de s’y intégrer. D’épouser une nouvelle culture. Comme des milliers d’étudiants le font, chaque année au Saguenay, à l’Université du Québec à Chicoutimi, ou dans un de nos quatre Cégeps. Des milliers d’Africains, de Magrhébens, de Chinois ont opté pour le Saguenay comme terre d’accueil pour vivre une nouvelle vie, mais une poignée seulement resteront. Et ce n’est pas parce qu’ils n’aiment pas rester ici. Vraiment pas. C’est le Saguenay ou le Québec qui n’en veulent pas.

« Tu as été victime de racisme ici, Khady? » La question l’a fait sourire de toutes ces belles dents quand je lui ai posé la question, vendredi passé chez moi. Oui. Elle l’est. Et pas toujours de façon directe. Le racisme latent, hypocrite est bien pire. Te faire traiter de négresse par un individu sans cervelle fait beaucoup moins mal que de te voir refuser un stage dans une entreprise, que d’être la dernière choisit pour un travail d’équipe, que d’être reconnue coupable sans avoir eu droit à une enquête. Uniquement par ta couleur de peau, ton allure, ton odeur. Pour leur permettre de suivre un stage en entreprise, indispensable à la réussite de leurs études, les intervenants des institutions d’enseignement doivent user de tous leurs atouts pour convaincre les entreprises de les accepter. Je ne parle pas ici d’avoir à placer des derniers de classe, des cancres, et je parle encore moins d’embauche à temps plein, mais uniquement d’un stage bénéfique à la fois à l’étudiant et à l’entreprise. On ne parle ici pas de charité. Mais c’est quasiment ce que l’on doit faire pour solliciter les entreprises.

On dit souvent que le racisme vient surtout de l’ignorance. Pas toujours. On ne peut pas être ouvert à toutes ces cultures culinaires, littéraires, etc. sans l’être à leurs auteurs, ceux de qui tout cela origine. On se targue de vouloir voir le monde, mais quand ce monde est notre voisin, on lui ferme la porte. On ne veut surtout pas le voir. Le tourisme à sens unique.

Pourtant, nous voyageons comme jamais, nous bouffons cantonais, créole et libanais et nous nous préoccupons d’envoyer des sous en Haïti quand son peuple souffre de la multiplication de cataclysmes. Nous n’avons jamais été autant citoyens du Monde. Nous n’avons jamais autant aimé le Monde. Nous aimons tellement ce qui vient d’ailleurs. Tellement. Que nous préférons qu’ils restent ailleurs. Surtout pas chez nous.

Chroniques helléniques – partie 5

L’APOCALYPSE SELON ST-MARC
Scène 1 
L’arrivée au port de Raffina vers 14h30 allait donner le ton à la journée. Bordélique et anarchique, beaucoup de gens dans la confusion tentaient de récupérer leurs bagages et de se frayer un chemin parmi d’autres gens qui eux cherchaient à monter à bord les premiers. Comme si personne n’avaient de billets réservés et que le nombre de passagers serait restreint. Je réussis tant bien que mal à récupéré nos sacs. Le temps est compté. Comme tous les transports en commun sont annulés, la seule façon pour quitter le port demeure le taxi. Pas besoin d’être comptable pour réaliser que plus de 300 passagers pour une vingtaine de taxis, il y aura bousculade et attente.
Plusieurs chauffeurs ont des affiches avec des noms écrits dessus. J’ai été con de ne pas y penser, j’aurais pu réserver moi aussi un transfert et ainsi m’assurer de pouvoir quitter rapidement. Un chauffeur avec le nom  » Wins » (c’est un signe!) écrit sur son affichette m’aborde en me demandant où je vais. Quand je lui ai dit au coeur d’Athènes, son affiche a pris le bord et il a décidé de me rebaptiser. En route!

Scène 2
Sur la route, on échange sur nos modes de vies, mais surtout sur le conflit qui se joue en face du parlement. Il m’annonce tout de go qu’il sera très difficile de se rendre près de le place Syntagma : coeur de la manifestation et emplacement de mon hotêl, mais qu’il fera le nécessaire pour s’y approcher.

Scène 3
Quand on a entré dans Athènes, la vie semblait rouler comme à l’habitude. On était encore loin du noyau ou des pépins… Les embouteillages ont commencé à être de plus en plus fréquents, mais notre chauffeur est un rusé, plus de vingts ans à sillonner les rues de la capitale. Prenant des petites rues moins congestionnées, il réussit à contourner les premiers barrages policiers que nous apercevons. Il nous répète que ça sera pas facile. On le croit, on est comme dans un manège, tourne, retourne, recule, prend une ruelle, une autre, coupe une voiture, un scooter, un cycliste, tout en grommelant des mots grecs qui ressemblent à des jurons. Autour, des poubelles ont été vidé sur le sol, certaines brûlent encore. Nous arrivons dans un cul-de-sac, un barrage policier nous ordonne de passer et de tourner à droite. Notre chauffeur acquiesce sans remarquer la barrière en métal à sa droite qui jonche le sol. Un son strident de métal se fait entendre, mais qu’importe, nous continuons de rouler. Quelques 500m plus loin, on s’arrête pour constater les dégâts : la Mercedes jaune vif a une cicatrice de 48 pouces sur le pare-chocs avant. Les jurons sont plus fort. Commence à s’ennuyer des Wins notre chauffeur et nous annonce qu’il ne pourra pas avancer plus loin. Nous sommes, selon lui à 500m de notre hôtel…

Scène 4
Munis d’une carte et de nos valises, nous avançons dans les rues. Tentant d’éviter les détritus, demandant notre route à certains policiers qui surveillent les barrages, demandant surtout si la place est sécuritaire.
Au loin, on attends des pétarade de gaz lacrymogènes lancés par les forces de l’ordre aux manifestants, les sirènes font du vacarme aussi. Nous avançons toujours. Et puis, voilà le silence. Nous marchons au coeur d’Athènes, tout prêt du conflit et il nous semble que nous sommes seuls. Les rues désertes. Jusqu’à une nouvelles slave de bombardements ou la vue d’un autre barrage.
À trop vouloir contourner le Place Syntagma, nous nous sommes perdus. Notre carte ne contient pas ces petites ruelles qui changent de nom aux intersections. Nous demandons à un couple de nous aider à trouver notre chemin. La fille porte un masque de plastreur, a les sourcils blancs et son chum nous demande si on est vraiment obligés d’aller la-bas. Ce sont des manifestants qui ont pris part à cette grève générale. En nous expliquant le chemin à prendre, il nous souhaites bonne chance en nous donnant des mouchoirs  pour couvrir nos bouches en nous ordonnant de ne pas enlever nos verres fumés.  Yen aura pas de facile.

Scène 5
Alors qu’on est encore perdus, ma blonde aperçoit une agence de voyage où l’on pourrait se renseigner. Le proprio me dit ne pas me rendre sur place si je n’ai pas payé encore ma chambre. Je lui mens en me disant que je m’organiserai bien avec Visa à mon retour. Sous ses conseils, nous réservons un hôtel plus loin du conflit. Toute cette route faite avec nos bagages aura été vaine. Nous devrons prendre le métro pour se rendre à notre nouveau logis.

Scène 6
Dans le métro, on sent les gaz. On sent la frénésie. Les gens rencontrés ont tous des marques blanches sur leurs vêtements, certains le visage au complet. Résultat des gaz. Des jeunes avec des drapeaux et des porte-voix et des masques pour se protéger. Des moins jeunes, avec des complets cravates. Des plus vieux. Des femmes et des hommes. Il serait malhonnête, comme le font les médias, de dire qu’uniquement des jeunes ont manifesté en avant du Parlement. Des gens ordinaires à bout de nerfs. Autour de nous, des gens pacifiques aux visages quelques fois tuméfiés, mais toujours fiers semblent consternés par ce qui vient d’arriver. À la sortie du métro, des autobus organisés attendent les manifestants : on est venu des quatre coins de la Grèce pour manifester son désaccord sur ces coupures sévères et surtout cette loi que s’apprête à entériner le gouvernement, cette loi qui rendra l’austérité encore plus sévère.

Scène 7
On a mangé une pizza en carton dans une chambre dégeu. Après avoir réussi à passer toute cette aventure sans incident, il était plus logique de rester ici. Dans cet hôtel sans wifi…

Scène 8
En prenant un café, sur une terrasse ou je squate le wifi, je vois ces vieux qui jasent, argumentant sur la journée d’hier. La paix semble revenue. Le quotidien se déploie. Faudra voir…

Chroniques helléniques – partie 4

De grève en grève
Après avoir foulé la grève dorée de Mykonos, l’inexistante de Santorini et la poudreuse de Paros, voilà que demain nous foulerons celle d’Athènes. Une autre genre de grève j’en conviens. Pas de sable fin, ni d’eau salée, mais une avec une peu plus de vagues je pense. Voilà que la Grèce toute entière est mise sous arrêt. Une grève générale perturbe le pays mettant en tutelle tous transports en commun et services publics. Le traversier qui devait nous mener de Paros au port de Pirée est paralysé par celle-ci. Nous avons dû trouver un plan B : passer par un autre port, çelui de Raffina, à quelques 30km de la capitale. On verra comment se rendre par la suite à notre hôtel… en plein coeur du centre-ville d’Athènes. Les voyages forment la jeunesse. On verra demain si on a encore la fibre adolescente de l’aventure…

On est au ralenti… comme le pays.
Si nous avons atteint le neutre et que la vie se passe tout doucement pour nous, il y va différemment pour les Grecs. On sent bien que les touristes ont boudé cette destination cette année : terrasses plutôt vides, rues moins achalandées, mêmes les îles voient leur économie ralentir. Cette artiste de qui nous avons acheté des bijoux, cassant le français, heureuse de nous dire qu’elle connaissait des canadiens en Ontario qui nous confessait qu’il y avait si peu de touristes cette année à ces serveurs qui en mettent un peu plus qu’à l’habitude, il faut être aveugle pour ne pas sentir que les choses ne tournent pas rond ici. Austérité, peut-être, mais malveillance, jamais. Avant notre départ, plusieurs personnes s’inquiétaient ou tentaient de nous faire peur sur les possibilités que notre séjour soit perturbé d’une façon ou d’une autre, mais jusqu’à maintenant les grecs rencontrés nous ont parus très sympas. Un peu bourrus,  comme le sont les  méditerranéens, mais gentils, drôles… et fumeurs! Diable que nous n’étions plus habitués a être boucanés de la sorte. Sur les terrasses, dans les restos, plages, etc, toujours cette fumée secondaire qui nous agresse. L’ancien fumeur en moi a su distinguer certaines marques, mais pas d’envie d’y regoûter.

Assis à un café, en attente du bateau, j’écris ces quelques lignes à la sauvette afin de replonger dans mon roman au plus vite. Je tenterai de prendre quelques clichés des manifestations à Athènes…

Chroniques helléniques – partie 3

En relisant mon dernier billet, j’ai ressenti un certain malaise. De ceux qu’on a quand on se rend compte que ce qu’on a écrit en 600 mots auraient pu se résumer en 25 derrière une carte postale. Des balivernes. Des mots qu’on aligne un après l’autre pour rassurer les proches, des mots clichés sans saveur. Il fait beau, on pense à vous. Mon dernier billet avait le sex-appeal d’un Guide Michelin et goutait l’agenda. Voilà, c’est terminé. N’en parlons plus. Parlons désormais des vrais affaires:il faut beau, on pense à vous.

Miam.
Quand je reviens de voyage, il ne faut pas me demander ce que j’ai vu ou fait, il faut m’interroger sur ce que j’ai mangé. À Athènes, un resto trouvé grâce à mes recherches sur internet, Kuzina, a réussi a bouleverser mes papilles. Le restaurant réinvente la cuisine grecque, puisant dans sa riche histoire des recettes oubliées ou de nouvelles interprétations de classiques, et ce, toujours avec un souci d’utiliser des aliments frais de provenance. C’est ici que j’ai goûté pour la première fois à la bottarga, une pâte créée à partir d’oeufs de poisson, salés et séchés que l’on tranche en fines lamelles et réveille d’un filet d’huile d’olive sur un petit pain. Délicieux, ça m’a rappelé un peu l’anchois et la sardine. Je tenterai d’en apporter innocemment dans mes valises.
À Mikonos, en soupant à la Taverna Matthew, j’ai eu la chance d’échanger quelques mots avec une gentille dame d’une table voisine. Grecque émigrée aux States, elle venait passer quelques mois dans sa maison à Ano Mera. Elle a eu la gentillesse après un toast d’ouzo, de m’orienter sur le menu. Les anchois marinés étaient fabuleux! Je pesterai encore pendant plusieurs mois contre ceux que j’achète, même chez Milano à Montréal, en pensant à ce goût sans saumure si savoureux. Je vivrai le même backslach qu’à mon retour de Barcelone. Misère.
De Santorini, je ramènerai des feuilles de câpres. J’aurais bien ramené des tomates, mais je doute que Douanes Canada approuve. Il faut savoir que le volcan n’a pas que laissé un paysage à couper le souffle à cette île grecque, son sol ravagé par la lave a vu son ADN se modifier. Sa terre devenue très fertile a développé des saveurs que l’on ne retrouve nulle part ailleurs; aubergine blanche, tomate miniature a peau croquante, fava, etc. Même chose pour les fromages; depuis mon arrivée j’ai mangé du feta tous les jours, sans jamais avoir eu l’impression de manger le même fromage. J’en bave à en parler.

Des kilomètres de mots.
Y a pas que la bouffe qui me fait vibrer depuis que j’ai posé le cul ici. Ça n’a rien à voir avec le pays, mais avec mon état d’esprit. J’ai repris le goût à la lecture. Pas que je l’avais perdu, mais je ne lisais que des trucs reliés au travail, des magazines, etc. Je m’apprête à entamer les romans de ma blonde, je suis venu à bout des miens. Des milliers de pages englouties voracement, je m’en voudrais de passer sous silence Middlesex . Ce roman racontant l’histoire d’un hermaphrodite et plus largement l’histoire d’une famille : des immigrés grecs arrivés aux États-Unis en 1922 après avoir fui leur ville natal envahi par les Turcs. Des terres d’Asie Mineure aux quartiers de Detroit, Jeffrey Eugenides, celui à qui l’on doit Virgin Suicides – mis en film par Sophia Coppola, dresse un portrait de l’Amérique des années 20 aux années 70. Un livre difficile, mais terriblement beau. Trouvaille qui allait parfaitement avec ma destination. Il parait que le goût d’écrire vient avec celui de lire. Ça me donnera le coup de pied au cul pour cesser de négliger ce blogue.

Sinon, en 25 mots : il fait beau, le paysage est époustouflant (marcher la dizaine de kilomètres à flancs de montagne, reliant Fira à Oia, pour y voir mourir le soleil dans la mer Égée fût génial) et on a hâte de vous revoir (pfff, quel menteur!).

Chroniques helléniques – partie 2

Ça tangue. J’ai l’impression d’être dans le manège de la Pitoune à La Ronde. Y a de l’eau qui perle sur les vitres. Ça tangue encore. On vient à peine de quitter l’île de Mykonos sur une frégate rapide. Elle nous mènera à Santorini, troisième étape de notre voyage. Le bateau est tout de même confortable. Ma blonde n’est pas du même avis que moi. Elle lutte contre le mal de mer. Il faut dire que les vents extrêmes de ce matin rendent la traversée plus périlleuse. J’ai l’impression que les trois heures que dureront la croisière ne sera pas de tout repos…

Retour sur Mykonos
Relaxe. Si la destination est reconnue pour ses fêtes éternelles, prisée par toute une jeunesse, pour nous elle aura été tout le contraire. Sous les soins de Maria, la propriétaire du Amazing View Hotel, le complexe de huit petits studios que nous avions choisi, on nous a bichonné comme des bébés. D’abord, le studio : je ne pense pas que le nom soit exagéré, la vue de notre terrasse était hallucinante. Surplombant la plage d’Agio Stefanos, juché à plus de 750m du niveau de la mer, nous avons pu décrocher et se reposer comme nous le souhaitions. La marche pour se rendre à la plage a fait passer les kilos de fêta engloutis depuis notre arrivée. Si l’expression monter dans la face d’un singe décrit une pente extreme, mon chympanzé n’avait pas de nez, ni de menton. Un mur.
Puis les déjeuners de Maria. La plupart des hôtels offrent un petit déjeuner de base constitué d’un café et d’un yogourt. Pas ici. Deux cabarets apparaissaient chaque matin : fromages, fruits, charcuteries, tomates, olives, beignets, miel, confitures, jus, etc. Place charmante, je vous le recommande chaudement.
Mise a part notre petit nid, Mykonos s’est avéré sympathique, surtout quand on sort de la Chora, le village le plus important de l’île ou s’agglutinent mauvais restos hors de prix, boutiques de souvenirs made in china et les hordes de touristes et de croisiéristes débarqués pour la journée. Une location de voiture nous a permis de faire un tour de l’île, d’emmagasiner d’autres points de vue, mais surtout de constater que les grecs conduisent de façon assez cavalière. Les minuscules routes, sans accotement ni garde-fou, tournant a 90 degré dans les montées dans lesquelles je me faisais passé à toutes vitesses m’ont fait apprécié la petitesse de ma voiture. Comme dans les autos tamponneuses de La Ronde, nous en sommes sortis avec plus de peur que de mal.
Ce qui nous ramène à La Pitoune. Qui tangue. Qui donne mal au coeur à ma blonde. Qui lui rappelle les trops gros déjeuners de Maria…

De bonnes nouvelles
Si vous suivez mon blogue, vous vous rappellerez que lors de notre dernier voyage à New York, nous avons été les premiers arrivés sur les lieux d’un terrible accident de voiture (raconté ici). Avec la magie de Google et de son service de traduction, une des victimes, Boris, est tombé sur mon récit et m’a adressé un commentaire de remerciement extrêmement touchant. Je suis content que cette aventure se termine mieux pour eux. Bonne chance pour le reste.

Aussi lu sur Facebook, deux petits messages de mes deux enfants qui m’ont adressés des voeux pour la fête des pères. Je vous aime aussi.

Chroniques helléniques – partie 1

Farniente. Même si c’est du latin et que je suis en Grèce, c’est le mot qui définit le mieux ma vie depuis mercredi dernier. Rien. Rien faire. Je me suis arrêté tout d’un coup. Après une course folle de plusieurs jours, de plusieurs heures par jour, j’ai subitement tout arrêté et pris la direction vacances.

Je n’ai vraiment aucune difficulté à me mettre dans ce mood-là. On pourrait croire à tort que puisque je travaille beaucoup j’ai de la difficulté à tout mettre en suspend. Bien au contraire. Quand je suis entré dans ma voiture mercredi matin, en direction de Montréal pour prendre l’avion, j’étais déjà ailleurs, arrêté, dans un état de grâce. J’écris ce billet de Mykonos. De mon balcon qui donne sur la mer. Je comprends les Dieux d’avoir choisi la Grèce comme terre d’accueil, moi aussi, je me sens soudain invincible, en train de me reconstruire, de prendre des forces, de revivre… Voici donc quelques notes de voyage, prises ici et là.

Athènes que pourra, on y arrivera.
La Grèce vit des moments plutôt difficiles, économiquement parlant. On manifeste un peu partout perturbant l’ordre social. Athènes, sa capitale est aux prises avec des grèves de plus en plus fréquentes. À la sortie de l’aéroport, le chauffeur du bus public devant nous mener à la Place Syntagma, a décidé de nous faire descendre quelques kilomètres avant : la place était inaccessible pour cause de manifestations, on a du se rabattre à héler deux taxis qui nous ont aussi laissés tomber. Le premier parce qu’il n’arrivait pas a comprendre la direction que je lui demandais, le deuxième me disant que comme l’autobus, il lui était impossible d’accéder au quartier. On a dû se rabattre à prendre le métro. On a finalement pu rejoindre notre hôtel…
Le Fresh Hotel fait partie du cercle très fermé des «Design Hotel», lignes pures, couleurs vives, matériaux synthétiques, il ressemble aux hôtels très tendances comme le Pur à Quebec, ou le W a Montréal. Super cool comme endroit. Je n’aurais jamais payé pour le prix indiqué, bénéficiant d’un prix trouvé via Expedia.ca.

Mes impressions sur Athènes? Pas si pire. On m’avait tellement dépeind la capitale comme étant un endroit dangereux et désagréable que j’ai été plutôt conquis. Oui, la ville est sale et plutôt lugubre par endroits, mais de là à ne pas me sentir en sécurité, non. Je connais des endroits au Saguenay, où j’aurais plus peur de me promener la nuit. Mon hôtel, bien que très design se trouvait dans le red light : prostituées, junkies, etc, faisaient partie de la faune qu’on a croisé vers 1h00 lors du retour d’un excellent souper. Pas pire que de marcher sur St-Laurent / Ste-Catherine, un vendredi soir. Je ne me suis jamais senti en danger.

Les pieds dans le jus de poisson.
Je le confesse; si certains en voyages courent les musées ou les casinos, moi ce sont les marchés. Et l’avantage d’avoir choisi un hôtel en plein coeur de la ville était d’avoir la chance d’avoir accès au marché central d’Athènes. Bien que j’ai eu l’opportunité d’en visiter des supers comme le marché de la Boqueria à Barcelone, celui d’Athènes n’avait pas uniquement l’attrait de ses produits, mais bien celui de ces bouchers et poissonniers. Il faut les voir attirer les clients marchant dans l’allée centrale, proposant des prix, hurlant des deals plus alléchants que son compétiteur d’en face. Comme nous y sommes passés très tôt, nous avons pu voir les marchants placer leurs victuailles, nous avons eu le privilège de marcher dans l’eau des poissons qui dégoûtaient des étales, transportant sous nos chaussures cette odeur jusqu’aux confins du Parthénon. Je vous fais grâce de cette visite. Bien que grandiose et intéressantes, ces visites le seraient encore plus si on avait pas à subir tous ces touristes zezons qui te font sentir bête de faire partie de leur groupe.

Chroniques Sénégalaises – Partie 8

Une des craintes partagées par notre équipe dans notre voyage humanitaire portait sur la qualité de la nourriture, sa quantité et sa salubrité. C’était avant que Dieudonné Gandoul se joigne à nous à Thiaré. Ce dernier est notre chef attitré. Il est responsable de planifier les achats pour la cuisine et de préparer les repas, matin, midi et soir. Et il est très bon. Nous avons eu droit à des spécialités sénégalaises comme le sombi dijierté (riz au lait amélioré), un plat qui goûte et ressemble à un tapioca : un riz très collant avec des noix et des bananes; le thièbe djiéne (riz au poisson) — poisson frit avec riz tomaté épicé et légumes; thièbe yapp (rz à la viande) — riz avec boeuf et légumes; thiou à la viande de mouton — on aurait pu ajouter récalcitrante sous la dent… mais au goût c’était excellent; du poulet yassa — riz et poulet mariné. Mais comme la bouffe est de plus en plus métissée et que les cuisines se ressemblent, nous avons eu aussi droit à du couscous marocain aux légumes, du spaghetti bolognais et du poulet frit. Servi à la sénégalaise dans de grands plats que tout le monde se partage. Stratégiquement, il faut savoir avec qui se placer. Un conseil, si c’est un plat que vous aimez, évitez de vous assoir devant un goinfre…
Comme je filtre l’eau tous les jours et que cette besogne est réalisée près de la cuisine, combiné à ma passion de la bouffe, j’ai eu la chance de discuter souvent avec Dieudonné. Quand il était enfant, il avait deux rêves, celui d’être infirmier et celui d’être cuisinier; le voilà comblé de préparer les repas dans un dispensaire de santé pour un mois. Charmeur et bavard, il m’a raconté qu’à sa naissance, son père et sa mère ont divorcé et que son père avait demandé et obtenu la garde de celui-ci. Mais comme son père ne s’est jamais remarié, il s’était rapidement retrouvé pensionnaire chez les pères catholiques pour y parfaire son éducation. Il fait donc partie du maigre 5 % de confession catholique alors que plus de 85 % de la population sénégalaise est musulmane. Une religion pratiquée à la sénégalaise : calmemement et pacifiquement. Les chants à Allah nous réveillent chaque matin vers 6 h 15 et reviennent 3 fois dans la journée. Même si la religion, c’est une affaire personnelle, je ne peux m’empêcher de penser à Richard Desjardins qui disait « Que cé que le Bon Dieu a contre l’Afrique…» quand je vois les conditions difficiles dans lesquelles certains vivent en région comme Thiaré…
EN VRAC
Je ne suis pas le seul a avoir eu ma dose d’émotion. Alors que la clinique était fermée un peu avant le souper et que chacun de nous était dispersé, une femme et son jeune poupon se sont présentés. La petite éprouvait des difficultés respiratoires majeures. Un étudiant l’a pris en charge et lui a fait une technique de claping. Le petit corps inerte de la petite dans ses bras, lui faisait craindre le pire. Après une dose de Ventolin, la mère est repartie avec un enfant qui nécessiterait des soins beaucoup plus spécialisés que ceux dont est capable de dispenser la clinique. C’est le constat difficile que ce futur infirmier a été en mesure de vivre…
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Selon un sondage paru dans le Dakar Life, un magazine acheté dans la rue jeudi, la femme idéale pour le Sénégalais a la peau claire; une poitrine généreuse; ni trop ronde, ni trop mince; élancée; cheveux longs; pieuse religieuse croyante; âgée de 25 à 29 ans; niveau Bac et au-delà; elle doit savoir éduquer et elle ne doit pas être menteuse… Pour ma part, je peux vous garantir que la femme sénégalaise est vraiment très jolie…
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Vendredi soir, nous avons eu droit à un petit party improvisé : les griots sont venus jouer du djembé en face du dispensaire pour nous faire danser. Oui, oui, je me suis encore couvert de ridicule… On a été rapidement rejoint par une foule. La danse africaine, c’est génial, séduisant et très physique. Fallait voir les petites d’à peine 3 ans donner des coups de hanches sur le rythme des percussions… On avait du sable jusque dans le fond de nos bobettes…

Chroniques Sénégalaises – Partie 7

Qui dit projet sans queue ni tête, dit projet intéressant.
Malick devait se rendre à l’ambassade du Canada à Dakar pour régler quelques paperasseries afin de pouvoir venir au Québec en février. Comme je m’entends très bien avec lui, que j’aime bien les projets qui n’ont pas d’allure et que je n’ai pas le mal des transports, je me suis dit que ça serait cool de l’accompagner dans cette course contre la montre…
12 Janvier – 22h – Nous embarquons dans le bus sur la «main» du village de Thiaré. Première constatation c’est un bus pas mal mieux que ce à quoi je m’attendais. Pas plein du tout, ce qui nous permet de prendre un banc chacun et de ne pas devoir le partager avec un quelconque animal. Si nous n’avions pas eu à arrêter dans 8 villages sur notre route, à vivre avec les lumières complètes et d’écouter la musique à fond tout le long du parcours, cette étape nous aurait permis d’emmagasiner quelques heures de sommeil. Mais bon.
13 Janvier – 4h30 – On vient d’arriver à Dakar. Pas dans le centre-ville, car le bus nous laisse en banlieue. Je suis à demi rassuré. Il est tard, on ne voit rien et j’ai  entendu plein de trucs sur Dakar. Quand je questionne Malick là-dessus et lui demande si c »est dangereux, il me répond : du tout. J’avoue qu’avec un peu de recul, c’était plutôt niais comme question et que j’aurais dû la poser avant d’entreprendre ce trip… J’imagine ma face s’il avait répondu « beaucoup!»
4h35 – Après l’avoir négocié, nous prenons place dans un taxi qui nous mènera en plein centre-ville de Dakar. L’autoroute est tranquille, les Dakarois dorment. Tant mieux.
4h55 – Place de l’Indépendance, nous commençons à marcher à travers les rues endormies de la ville. Ici et là, des gens se promènent. Près des parcs, des clochards sont couchés, près des commerces, des gardes font le guet, et sur les coins de rue, les putes s’activent. Nous avalons nos premiers kilomètres en passant devant le Palais présidentiel, le Sénat, l’Hôtel de Ville. C’est un peu weird de visiter une ville de noirceur.
5h25 – En passant devant ce qui nous semble le seul restaurant ouvert à cette heure, un restaurant libanais, Malick me dit qu’il a faim. Je le regarde manger pendant que je réalise que la première raison de notre voyage sera réalisée à 8h00 du matin… dans presque trois heures. Je profite du resto pour aller à la salle de bain. L’horreur.
5h45 – Nous continuons notre visite de Dakar By Night en descendant près du port. Je suis surpris de voir que c’est si calme. Je m’attendais de voir plein de gens, des travailleurs de nuit, des gangs de rue, etc. Rien. Certains travailleurs commencent à se pointer…
7h00 – Après quelque 10 kilomètres dans des rues mal éclairées, le soleil commence à se pointer timidement. Nous en profitons pour prendre quelques expressos serrés pour nous réveiller un peu.
8h00  – En pied de grue devant la Pharmacie Guignon, nous sommes les premiers clients. Nous sommes venus chercher les médicaments spécialisés pour les enfants atteints d’ichtyose erythrodermique.
8h10 – En route vers l’Amassade du Canada. Malick s’arrête devant les grilles d’une école primaire et me dit qu’il a passé 5 ans de sa jeunesse dans celle-ci. On fait le tour du bloc et de l’autre côté se trouve son école secondaire. Alors que nous nous apprêtons à quitter ce quartier plein de souvenirs, une voix sortant d’une petite échoppe à café crie le nom de Malick. C’est le même monsieur qui lui servait son déjeuner quand il était étudiant qui vient de le reconnaitre! Malick me dit qu’il a été bouleversé de le revoir; je suis flatté de partager ces moments avec lui.
9h00 – Amabassade du Canada – on nous annonce que les prises de rendez-vous se font uniquement à… 10h30. On repart pour une dizaine de kilomètres…
10h30 – Enfin. La procédure est rapide; nous repartons, Malick a un sourire béat au visage, son séjour au Canada se rapproche.
11h00 – Nous allons dîner. Resto ordinaire, mais nous n’avons pas trop de temps devant nous, nous devons retourner à Thiaré… la route est longue.
11h30 – En avant du resto, on prend un taxi pour se rendre à la « gare routière » pour prendre un taxi-bus. Ce que les Sénégalais appellent une « gare routière » est un stationnement qui ressemble à une cour à scrap où une centaine d’autos sont en attentente de passagers. Nous cherchons ceux qui se rendent à Koalack. Aussitôt trouvé, on s’assoie à l’intérieur de l’auto et attendons les six autres passagers qui nous accompagneront. En attendant, nous sommes sollicités de toute part, vendeurs de fruits, portefeuilles, biscuits, sous-vêtements; les vendeurs entrent leur stock par les fenêtres de la voiture et nous les étalent sous le nez. C’est le chaos.
12h00 – Notre voiture démarre en frisant d’écraser un aveugle qui quêtait sur la rue. Notre jeune chauffeur est un pilote de Formule 1. Nous atterrirons à Kaolack en 3h15, une route qui en prend normalement 4…
15h15 – Taxi, direction centre-ville de Kaolack. Malick a encore quelques procédures administratives exigées pour l’obtention de son visa de visite: preuve de travail, possession d’un compte de banque, autorisation de son école, etc. Nous ferons quelques kilomètres de marche (encore!). Au coin d’une rue, un motocycliste me rentre dedans… je chute par terre. En me relevant, j’aperçois Malick enguirlandant mon agresseur lui criant de s’excuser. Ses cris ameutent certains passants qui s’attroupent maintenant autour de nous… Ils sont plus d’une douzaine à dire au chauffard qu’il a tort de ne pas s’excuser…  Nous prenons finalement un autre taxi qui nous mènera à la « gare routière » de Koalack. Même description que celle de Dakar, mais celle-ci est entourée de déchets et ça sent le chien mouillé…
17h00 – Nous sommes finalement en route dans un petit autobus plein à craquer…
18h35 – Terminus Endo Phan. Nous arrivons. Boucbacar nous a envoyé un assistant infirmier pour nous ramener à la maison. Sa Peugeot doit tenir à si peu de chose, que le sable entre dans celle-ci, sous nos pieds.
19h15 – Thiaré. Je ne pense pas m’être couché… je parlerais plutôt d’évanouissement.

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