Chroniques Sénégalaises – Partie 1
Voilà. Nous sommes en route. Une longue route. Partis par bus de Chicoutimi depuis 6 h 30 (le 2 au matin), nous venons d’atterrir à Charles-de-Gaulle… pour une escale de huit heures avant notre vol pour le Sénégal. On devrait fouler le sol de l’aéroport Léopold Sédar Senghor de Dakar le 3 janvier à 21 h heure locale. Je suis assez imperméable à ces longues attentes. Je lis, je dors, je griffonne, j’écoute de la musique. Le temps n’a plus d’importance quand tu le laisses couler, quand tu en fais ton allier. Les étudiants qui m’accompagnent jouent aux cartes en attendant de jouer leur propre rôle d’infirmier ou d’infirmière sur un terrain qui leur est totalement inconnu. Ils sont enjoués et sereins; j’ai hâte de voir leur visages à l’arrivée à Dakar.
Outre mon rêve d’aller en Afrique, je veux profiter de ce stage humanitaire afin de réaliser un film documentaire sur l’expérience que ces étudiants/tes s’apprêtent à vivre. L’idée première de ce documentaire est que cette aventure humaine changera le cours de leur vie. Peut-être pas aujourd’hui, peut-être à des degrés différents pour chacun, mais l’impact sera palpable un jour ou l’autre. Bien que nous vivions une époque où tout est documenté, archivé, diffusé, les contacts humains demeurent le foyer de combustion de la vie avec un grand V. Oubliez le web, les médias sociaux et tout ce que les technologies vous apportent : ce sont les vrais relations et contacts qui font toute la différence entre une rencontre anodine et une capable de changer le cours d’une vie.
Chaque intervenant une idée de ce qu’il l’attend là-bas. Chacun à un bagage intellectuel différent, vient d’un milieu culturel et social personnel, a beaucoup ou peu voyagé. C’est pourquoi chacun ne sera pas touché de la même manière, au même moment par les mêmes événements. C’est ce que nous tenterons de démontrer dans ce documentaire. De quelle façon des gens différents, ayant suivi la même formation, réagiront aux étapes vécues de leur périple?
À travers ce documentaire, je veux démontrer que le bénévolat ou le don de soi change le monde, certes, mais avant tout change la personne qui le fait. Il ne faut pas se méprendre ; avant de le faire pour les autres, les gens qui font de l’Aide humanitaire le font pour eux. Ils le font comme une expérience personnelle d’avancement, où pour combler un vide intérieur ou simplement pour vivre une expérience unique. Ce sont à ses attentes auxquelles le documentaire s’intéresse. Comment une fille du Saguenay qui n’a jamais ou peu voyagé réagira face à la souffrance ou au manque total de la population locale ? Comment vivra-t-elle l’éloignement de ses proches, et la trop grande promiscuité du groupe qui l’accompagne? Comment les risques de tomber elle-même malade interagiront sur son humeur ou son fonctionnement intérieur ? Comment ses valeurs se comporteront-elles vis-à-vis la confrontation de valeurs différentes, celles de ses compagnons et de la population sénégalaise ?
J’en profiterai pour faire le plein d’images. Pas uniquement sur pellicule, vous vous en doutez bien, mais au niveau de ma rétine personnelle. À moi l’Afrique.
Voici l’adresse pour consulter le blogue tenu par les étudiants pendant la durée du stage :
Stage Sénégal – Soins Infirmiers – 2011
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Chroniques Sénégalaises – Partie 6
Quand notre bus est entré dans la ville de Kaolack, entre deux bouffées de diesel Malick m’a lancé à la blague « bienvenue dans la ville la plus propre du Sénégal !». Nous roulions bel et bien sur une route, mais le décor ressemblait beaucoup plus à un dépotoir. Kaolack est la deuxième ville en importance au Sénégal. Son évolution trop rapide lui a causé un problème de déchets devenu rapidement hors de contrôle. À force de pousser ceux-ci en dehors de la ville sans penser qu’un jour cet emplacement serait nécessaire à son développement, la ville est maintenant couronnée de montagnes de détritus. Le diesel, c’est du Chanel N.5 comparativement à l’odeur dégagée par cette dompe.
Nous sommes partis ce matin de Thiaré pour aller visiter l’École Mboutou Sow (où Malick enseigne) et profiter de l’occasion pour remettre aux étudiants en Soins infirmiers des manuels scolaires québécois apportés par les étudiants. Ne le dites pas à nos parents ou conjoint(e)s, mais certains d’entre nous ont demandé au chauffeur du bus de faire une partie du trajet sur le toit avec les poches de riz, comme les Africains… Cool, mais des images trop sautillantes et une bonne dose de sable dans les cheveux… Bref, à Kaolock, nous avons pu réaliser l’absurdité d’une société trop riche : les livres scolaires que nous amenions étaient parfaitement neufs, jamais utilisés et ne le seront jamais au Québec, car l’éditeur aurait malencontreusement fait une erreur (mineure) selon l’Ordre des Infirmiers et Infirmières du Québec. Par la suite, nous avons été reçus dans un restaurant par le directeur de l’école. Excellente brochette de zébu, ce boeuf à grand corne qui nous coupe souvent la route, et discussion intéressante autour d’une Gazelle (bière locale).
Les larmes ne sont pas toujours synonymes de tristesse
Nous avions une autre mission à Kaolack. Pas mal plus difficile. Un mois avant de partir pour le Sénégal, Boubacar Faye, l’infirmier du poste de santé, avait contacté Chantale Deschesne, du Cégep de Chicoutimi, pour l’informer qu’une petite fille de 5 ans, dont le père enseigne à Thiaré, avait un besoin pressant d’un médicament pour traiter une maladie de la peau très rare, l’ichtyose erythrodermique (j’espère avoir bien noté!). Une maladie terrible qui dessèche la peau. En un temps record, Chantale a su ramasser les 600$ CA nécéssaire pour un an de traitemement en sollicitant la générosité de sa mère, Geneviève Gignac, du Club Lions de La Baie et de Marthe Lespérance, enseignante elle aussi au Cégep. Alors que nous discutions avec la dermatologue qui la traite, nous avons appris que non seulement la petite Aüssatou était atteinte, mais qu’Amadou, son frère de 8 ans, l’était également. On a pas réfléchi longtemps, Chantale et moi, il était impensable d’en traiter uniquement un : le petit bonhomme aurait aussi sa dose. Fuck les souvenirs. 300$, c’est le prix d’une cochonnerie inutile qu’on range dans le garde-robe du sous-sol pis qu’on oublie. Nous sommes donc partis avec Malick porter la bonne nouvelle à la famille. Je savais que cette rencontre serait pénible, mais pas à ce point. Je ne sais toujours pas comment j’ai pu tenir ma caméra et filmer sans trembler. Les enfants ressemblaient à deux grands brûlés, la peau sèche pendante, les yeux sans paupières, des crânes sans cheveux, deux corps frêles souffrant sous le simple contact de leurs vêtements. Calmement, le père nous a parlé des étapes de la maladie, des efforts qu’ils ont faits, mais que son manque de ressource financière malgré son salaire d’enseignant ne lui permettait pas de venir en aide à ses deux cas rares. Pendant que je filmais le petit bonhomme couché sur le dos sur le plancher de la maison, je refoulais mes larmes tant bien que mal. Pour nous remercier, leur mère nous a servi un verre de Fanta aux allures de Veuve Cliquot. Même la boisson orange passait difficilement tellement on avait le motton. Dans le taxi qui nous a ramenés au marché, où les étudiants nous attendaient, y avait des images qui se projetaient dans ma tête. Mes celles qui revenaient sans cesse me hanter, c’étaient ces grands yeux pleins de larmes, mais sans tristesse qui fixaient la caméra…
EN VRAC
Écrit en large lettre sur le mur de la bibliothèque de l’école Mboutou Sow ce magnifique proverbe sénégalais : Quand un vieux meurt, c’est une bibliothèque qui brûle… Tu l’aimeras celui-là, Black!
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Les Sénégalais sont trop gentils et veulent tellement t’aider qu’ils sont incapables de te dire non; résultat : quand tu leur demandes de t’indiquer une librairie dans le coin, ils te donnent mille mauvaises directions au lieu de te dire qu’ils ne savent pas…
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Décidément, mon égo de danseur en prend un coup. Après m’être couvert de ridicule devant le village à notre arrivée, voilà qu’en me promenant jeudi, je croise des musiciens ambulants. Je les filme et voilà que deux dames d’un certain âge qui passaient par là, viennent danser avec la troupe. Croyant que je leur ferais plaisir en me joignant à eux, ils se sont plutôt marrés. Tellement que les musiciens ne jouaient plus tellement ils se roulaient au sol…
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Mercredi, jour de marché à Thiaré – belles images en perspectives… Jeudi, si tout se passe comme prévu, j’ai au programme un voyage incongru : un aller-retour Thiaré/Dakar, de nuit en transport en commun – avec les habitants, les poules et les chèvres… Je vous rappelle que l’on a fait le même parcours en bus privé en 5h. Je vous en reparle…
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La Magie de Noël.
Quand on a nommé son nom, il s’est levé d’un seul bond, excité comme un enfant. C’était à son tour de recevoir son présent. Je lui ai tendu mon bras pour le diriger. Pas facile de se mouvoir dans une foule bruyante, dans un endroit méconnu quand tu es non-voyant. On s’est dirigé vers le Père Noël de service qui distribuait les cadeaux près de l’arbre décoré pour l’activité. Quand il a touché le paquet, j’ai pu voir une petite lueur dans ses yeux inertes. La magie des Fêtes ça existe, je pense; du moins à ce moment précis, j’en étais certain. Avec son sourire figé, son présent sous le bras, ma main sur son épaule, on s’est dirigé tranquillement se rassoir pour le déballer dans un endroit un peu plus tranquille. Ses doigts lissaient le papier. Pas trop pressé de l’ouvrir. Savourant chaque seconde ce petit bonheur, me demandant des détails, comme la couleur du papier, du ruban et du chou. Glissant sa main sous une des pointes du papier, il décolla doucement l’emballage comme s’il ne voulait pas le déchirer. J’avais l’impression d’être un voyeur. J’observais ces faits et gestes, ses manies en sachant très bien qu’il ne pouvait pas le deviner. Ses yeux morts bougeaient, intrigué par les détails qu’il s’imaginait. Quand la boîte fut déshabillée de sa robe de papier, il m’adressa un sourire en me disant : « qu’est-ce qui peut bien se cacher dans ce paquet?… ». J’avais devant moi, un grand gaillard de 60 ans aveugle, mais je voyais un petit gamin, un enfant émerveillé. Quand il ouvrit la boîte, il n’a pas pu remarquer la tragédie sur mon visage à la vue de son cadeau. Au milieu du papier de soie, au fond de l’emballage était déposé un cadre avec une reproduction d’un peintre impressionniste. Un cadre. Une peinture. Pour un aveugle. Je ne savais pas quoi dire. J’étais bouche bée. Les cadeaux avaient été distribués en fonction des sexes, sans penser que certains d’entre eux pourraient être inappropriés. Pourtant, mon ami, le cadeau sur ses genoux n’avait rien perdu de sa bonne humeur. La lueur dans ses yeux n’avait rien perdu de sa brillance. Son cadre dans les mains, il me demanda doucement de lui décrire la peinture qu’il contenait. J’étais sans mots. J’avais le motton. Je voulais être ailleurs. Mais j’ai décrit le paysage, en prenant soin de parler de la couleur de l’herbe, du contraste du ciel, des coups de pinceau qui composaient la scène. Je ravalais mes larmes à chaque qualificatif. Et lui, sans se douter de mon état, prenait grand soin de construire la scène dans sa tête. J’avais même l’impression qu’il suivait ma description en regardant le cadre et effleurant la vitre. « C’est beau… » Beau. Il me disait qu’il trouvait ça beau. Qu’il était content. J’aurais voulu être ailleurs. À mille kilomètres de lui. Et en même temps, j’aurais voulu être encore plus près de lui. Le serrer dans mes bras.
Dans une seconde vie, j’ai travaillé comme graphiste à la Maison de La Presse et j’avais décidé de participer à leur activité-bénéfice annuelle de Noël. Cette année-là, on était au Centre William Price à Kénogami, avec des gens seuls, malades, en perte d’autonomie. Pour une petite journée, on leur faisait vivre un peu de bonheur; le temps de faire un réveillon, de manger et de donner des cadeaux. Alors que je pensais que c’est moi qui leur apporterais quelque chose, je me suis vite rendu compte que ce sont plutôt eux qui allaient me chavirer. J’ai vu dans ces petits vieux, la misère certes, mais le bonheur aussi. Un bonheur qui se résumait à si peu. À un petit moment magique. Indélébile. Quand je suis entré chez moi ce soir-là, j’ai chialé toutes les larmes de mon corps. J’étais crevé, oui, mais j’étais bouleversé. je revoyais mon ami d’un après-midi regarder ce cadre qu’il ne voyait pas, en l’admirant, en le voyant. Et moi, dans mes larmes, j’ai vu aussi l’intangible. La petite flamme qui scintille dans chacun de nous. Cette petite flamme qui a souvent juste besoin d’un petit souffle pour revivre. Comme par magie.
Joyeux Noël à vous tous.
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Entrevue Traitdemarc™
Elle est entrée dans mon bureau avec son gros sac à dos. Que dis-je, son immense sac à dos. J’ai tout de suite pensé qu’elle avait stationné son auto dans celui-ci tellement il était disproportionné par rapport à elle. J’aurais compris, car il faut être chanceux pour trouver une place de stationnement ces jours-ci sur la rue Racine. Bref, elle est arrivée en maugréant qu’elle avait eu de la difficulté à trouver la place. Je ne savais pas si c’était ses gènes féminins ou celles de jeunes adultes ou simplement la nervosité qui la rendaient aussi impatiente. Faut dire qu’elle n’avait pas tort : ça fait plus de trois ans que je dois créer une signalisation pour mieux aider les gens à trouver mon bureau dans l’édifice où j’habite. J’imagine que c’est le juste retour des choses que de passer après mes clients. Elle avait cogné à ma porte si doucement que j’aurais cru que c’était cette pluie de décembre qui rebondissait sur la fenêtre. Jolie, cheveux longs, appareil dentaire, piercing, jeans, t-shirt et sac à dos démesuré : la parfaite cégépienne, quoi. Aussitôt la main tendue pour lui serrer, elle est devenue rouge comme ma causeuse. Ça mettait bien la table pour une entrevue. Allumée, sympatique et drôle, Pascale, jeune étudiante de deuxième année d’ATM (Art et Technologie des Médias) du Cégep de Jonquière avait choisi de me rencontrer pour me poser quelques questions sur le métier, dans le cadre d’un de ses travaux. Après l’avoir mise à l’aise en bannissant le «vous» de notre discussion et lui permettre de reprendre une couleur normale, elle a sorti son enregistreur numérique afin de commencer l’entretien. Comble de malheur, l’appareil n’avait pas de pile; qu’à cela ne tienne, nous avons donc fait l’entrevue avec mon iPhone. Ce qui me permet de vous la raconter.
La voici… avec quelques ajouts.
Pascale: Aujourd’hui je m’entretiens avec Mr. (oui, oui, monsieur!) Marc Gauthier qui a sa propre boîte de communication qui s’appelle Traitdemarc™, bonjour Marc…
Marc™ : Bonjour…
Pascale: Quand on pense à communication, on pense d’habitude à travail d’équipe, mais toi chez Traitdemarc™ c’est un peu différent, tu travailles seul… Est-ce que tu pourrais me parler des raisons qui t’ont poussé à travailler… heu… seul?
Marc™ : Ben en fait, je ne suis pas tout le temps seul. J’ai des gens qui travaillent pour moi, mais qui ne travaillent pas sur place. Je vais travailler avec des pigistes : si j’ai besoin d’illustrateurs, photographes (ou des programmeurs) je les engage; ce qui me permet de travailler avec les meilleurs du métier. Parce que si j’engageais un illustrateur (ou un autre professionnel…) à temps plein, je ne pense pas que je pourrais me payer le meilleur et j’aurais un illustrateur d’un seul style alors qu’en étant indépendant, je peux travailler avec les meilleurs du métier.
Marc™ : Ajout (hé oui Pascale, j’ai cette chance de pouvoir en ajouter…) Pour moi, la création n’est pas un travail d’équipe. C’est un travail solitaire, ardu et intellectuel. Le problème de la création en équipe ou de tout travail nécessitant un échange est la difficulté d’arrimer les humeurs et les personnalités. Dans mon cas, je suis incapable de pondre des concepts à une vitesse rapide, je suis de réflexion lente; ce qui fait que lorsque je me retrouve en brainstorming de groupe, je suis inapte à arrêter mon cerveau, car je dois écouter les autres. De plus, comme ma personnalité n’est pas d’imposer des idées, je me retrouve la plupart du temps en arrière… Y avait Foglia qui disait sensiblement la même chose dans une chronique, alors qu’il affirmait ne pas aimer participer à des débats en direct, car son temps de réflexion était plus lent que ses protagonistes ce qui le rendait très vulnérable dans une lutte d’idées. Je suis comme ça, au niveau de la création de groupe…
Pascale: Quand on parle que ta boîte se démarque (… jeu de mots!), on peut aussi penser au fait que ton site internet est un blogue au lieu d’un site commercial traditionnel, peux-tu me parler de cette démarche-là…
Marc™ : Ben en fait , je suis pas le seul à avoir choisi un blogue comme plateforme, moi je ce que j’aimais là-dedans, c’est de sortir du carcan de présenter des trucs graphiques, son porte-folio; de un, tout le monde le fait, je peux de toute façon rencontrer les clients et leur montrer celui-ci, de deux, je préfère que l’on m’engage parce que j’ai des idées et des opinions; je ne suis pas quelqu’un qui fait juste du « beau » graphisme. Une relation client est avant tout une relation humaine, quand il (un client) vient ici, il ne fait pas affaire avec une boîte, mais avec Marc Gauthier… qui aime la musique, qui ne se rase pas tous les matins et qui aime bien manger — (ici je la soupçonne d’avoir compris ça juste en me voyant la bedaine…) — c’est comme ça que je vois ça…
Pascale: Donc la dimension humaine est importante…
Marc™ : C’est exactement de cette façon que je traite mes clients. Je n’ai pas une relation très conventionnelle avec ma clientèle… plusieurs sont même devenus des amis avec le temps. Je ne joue pas de rôle, je n’ai pas de cravate, je travaille en t-shirt et en jeans, l’été en shorts. J’ai des clients qui, même après 8 ans de relation, me demandent encore quand on se rencontre : « hey! Es-tu en vacances? » Non, non, c’est mon habillement normal. Ça résume bien la façon dont je travaille. Mon bureau me ressemble, comme tu peux le constater, tu es assise sur un divan, ici y a pas de salle de conférence, tu as l’impression d’être dans un loft; quand tu débarques ici, tu es dans mon petit univers…
Pascale: Parlant de tes clients, pourrais-tu m’en nommer quelques-uns?
Marc™ : (censure)… plein de clients, sur mon blogue, en cliquant sur « client » tu pourras en connaître quelques-uns. Encore ici, au lieu d’avoir une liste exhaustive de clients, je préfère parler de ce qu’ils font dans la vie…
Pascale: Pusique tu travailles à plusieurs étapes de la création publicitaire, pourrais-tu me dire si tu as une étape préférée : le graphisme, la création…?
Marc™ : Je te dirais que c’est une des raisons qui m’a fait choisir de travailler seul. Je ne peux pas dire qu’il y une partie de mon travail que j’aime pas. Même les parties plus techniques plates comme découper des photos — dans Photoshop, par exemple — qui normalement dans une boîte plus grande serait assurer par des juniors alors que le grand créateur ne s’occupe pas de ça… ben moi ça m’intéresse aussi. Donc, je suis comme un artisan. Donc un client qui débarque chez moi, ben je m’en occupe de A à Z. Les parties « plates » de mon travail, je réussis à leur trouver quelque chose de l’fun. Disons que je m’organise pour les faire quand j’ai le cerveau à off. Comme la partie créatrice est toujours la plus intéressante, je vois ça comme manger un T-Bone : tu te gardes le filet mignon en dernier…
Pascale: En terminant, y a de plus en plus de boîtes de communications ou de publicité qui émergent Saguenay, est-ce un gage de qualité?
Marc™ : Ben, j’espère… y a eu pendant des années toujours les mêmes boîtes au Saguenay pis je pense qu’un vent neuf c’est jamais mauvais. Ça amène de nouvelles idées… Je pense que la jeunesse a cette qualité-là (quand elle le veut!!!!) de changer les choses. Je vois ça d’un bel oeil. S’il y a plusieurs boîtes, ça peut amener plus de clients à se faire produire des trucs de qualité; le problème n’est pas au niveau des boîtes, mais des clients qui ne veulent pas nécessairement suivre…
Pascale: Merci beaucoup!
Marc™ : Ben. Ça m’a fait plaisir…
J’aurais dû d’ajouter : vraiment.
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Synchronicité
Le mot « synchronicité » vient des racines grecques sun (« avec », qui marque l’idée de réunion) et khronos (« temps ») : réunion dans le temps, simultanéité. Pour un spécialiste de la psychologie analytique, la synchronicité est l’occurrence simultanée d’au moins deux événements qui ne présentent pas de lien de causalité, mais dont l’association prend un sens pour la personne qui les perçoit. Pour un créateur de toute sorte, c’est de la marde. C’est l’horreur de découvrir que l’idée géniale qu’il a eue a déjà été exploitée ailleurs. On ne parle pas ici d’un vulgaire plagiat, mais d’une coïncidence plate. Copier un concept, une idée, une image ou un style, c’est couillon et d’un manque flagrant de savoir vivre, mais se ramasser par hasard avec une idée déjà exploitée sans qu’on le sache, c’est uniquement déprimant. Premièrement pour l’auteur; se rendre compte que malgré toutes ses précautions, l’idée qu’il aura privilégiée de diffuser existe déjà; et pour son client à qui il la présentera, l’honnêteté du concepteur pourra être mise en doute, ce qui est plutôt malheureux surtout dans la mesure que c’est un accident.
Je vous en parle parce que dernièrement alors que je présentais un concept à une cliente, celle-ci m’a montré sur le site internet d’un de ses concurrents indirects, le slogan que je venais de lui pondre… À un article ou virgule près. C’est plate. Très plate. Dans le cas qui nous concerne, la cliente ne m’a pas paru désemparée, mais j’aurais préféré parer le coup. Si j’avais su, jamais je n’aurais présenté ce concept. Mais bon. Cela n’a rien remis en question et ça m’a permis de sortir un meilleur truc. L’important dans une pareille situation, c’est qu’il faut se servir de cet imbroglio pour mieux rebondir. Faire un saut créatif, quoi.
C’est doublement frustrant comme situation, car c’est rendu si facile de se vérifier… Googlez votre nom d’entreprise ou votre slogan et vous conviendrez qu’à moins qu’il ne soit d’une originalité sans pareille, c’est impressionnant de lire qu’y a autant de monde sur cette terre qui aura déjà eu la même idée que vous, pas dans le même contexte j’en conviens, mais certes. Si cette vérification s’annonce négative (donc, positive pour le créateur!), vous êtes habituellement sur la bonne voie.
La synchronicité arrive surtout dans le cas ou l’idée que vous avez, vous semble tellement évidente. Comme une stupide équation, mais surtout comme les meilleures idées, car ce sont la plupart du temps les plus simples. Quand j’avais décidé de créer ma propre entreprise, je ne voulais pas de nom de compagnie, car je savais que je voulais faire cavalier seul. Je voulais que les gens travaillent avec Marc. J’avais commencé à faire une recherche sur le net et des Marc Gauthier, il y en avait des légions…, et ce, même en graphisme. Et là m’est tombé du ciel ce nom : Traitdemarc™. Trop évident, je me suis dit. Je suis allé sur Godaddy pour vérifier pour me rendre compte que même le .com était disponible et que ce nom était brevetable (c’est fait depuis) ! Je trouvais ça cool d’être le seul. D’être unique. Je le trouve encore.
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#Fail.
Il vous est déjà arrivé de perdre un client? Pas toujours facile, hein? Un consultant, comme moi, perd des clients pour un paquet de raisons qui ne lui sont pas toujours attribuables. Par exemple, quand une entreprise effectue des changements majeurs au niveau de ses stratégistes marketing et que de nouveaux visages entrent en scène, il arrive régulièrement que nous fassions aussi partie du ménage. Pas nécessairement parce que l’on a mal travaillé, mais parce que l’on fait partie de « l’ancienne gang », celle que l’on remplace… par du sang neuf. On peut aussi disparaître du fichier fournisseur d’une entreprise parce qu’une offre concurrente est vraiment alléchante, au point de vue prix ou idée. On peut aussi se faire remplacer, uniquement pour assouvir un goût de nouveauté. Vous comprendrez que pour toutes ces raisons, bien que jamais notre professionnalisme ne soit mis en doute, la perte est tout de même là. Ma réaction vis-à-vis ce phénomène est assez simple, bien que je considère que la vie est courte, une vie professionnelle est paradoxalement plutôt longue. J’ai des clients qui vont et viennent depuis des années, me délaissant quelques mois voire des années pour revenir le temps de quelques mandats. Ne leur dites pas, mais je me compare souvent à leur épouse qu’ils trompent régulièrement avec une maîtresse… Ce n’est pas toujours facile à vivre, mais comme nous ne parlons pas d’une vraie liaison amoureuse, l’acceptation demeure la meilleure réaction si l’on désire continuer une relation d’affaires. Et comme nos retrouvailles sont toujours très passionnantes…, je n’ai pas trop à me plaindre. Ne fais-je pas la même chose avec certains fournisseurs? Je serais malhonnête d’exiger des autres une façon de faire que moi-même ne respecte pas. Bref, perdre un client sans que la faute nous soit personnellement attribuée est, dans mon cas, acceptable et fait partie de la « game » en affaires.
La deuxième catégorie, celle où nous sommes responsables du litige avec un client, est pas mal moins drôle à vivre. Y a une histoire qui m’est arrivée dernièrement; une amie m’avait pistonné chez un client qui n’avait eu droit qu’à des éloges sur mon travail. Après avoir déposé une offre de service et présenté un concept qui leur a vraiment plu, j’ai eu une certaine difficulté à livrer le produit final. Manque de temps ou de planification, j’ai étiré l’élastique du deadline du mieux que j’ai pu jusqu’à ce qu’il me pète au visage… Un gros #fail, quoi. Le client avait des sentiments contradictoires à mon endroit : un positif, celui du travail accompli conceptuellement parlant et celui du délai interminable que je lui avais fait subir. Bien que mon talent n’avait jamais été mis en doute dans ce dossier, mes méthodes de travail, elles, oui. Ce client m’a quitté. Et je ne pouvais que lui donner raison. Facile? Pas vraiment.
Bien sûr que je suis responsable de la situation. L’unique. Je n’ai personne d’autre à blâmer que moi-même. Travailler seul attire sur vous les louanges, mais si ça chie, c’est seulement vous que l’on condamne. C’est l’essence même du métier de consultant. Bien que je me suis excusé et corrigé à la baisse ma facturation, je sais bien que le mal est fait. Que ce client n’aura pas connu avec moi la meilleure expérience d’affaire de sa vie. Avoir l’humilité de ses limites et d’admettre ses erreurs est ce qui distingue les gens honnêtes. Il faut du courage pour avouer que l’on s’est trompé. Surtout dans un métier bien souvent fondé sur le paraître…
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J’ai le doute au nez
Je suis souvent dans le doute. Je doute de la couleur que je choisis. Je doute du mot que j’utilise. Je doute du média utilisé. Je passe des heures à changer de typographie. Je détruis et reconstruis mes mises en pages. Je joue mon titre sur une, deux, trois lignes. Je le mets en majuscule. En minuscule. Je rogne ma photo. Dérogne. Rerogne. Je noircis à l’infini les pages de mes cahiers. J’UNDO à l’infini. Mon back-up est ma bouée de sauvetage. Je fais des versions à ne plus savoir comment les nommer. Le doute fait partie intégrante de mon processus de création. Je ne vois pas le doute comme une faiblesse, mais comme une exploration obligatoire. Si je ne doute pas, c’est que je suis dans ma zone de confort ou pire, de facilité. Et c’est malsain.
Mes clients me font douter. Quand ils émettent des opinions différentes à la mienne. Quand ils m’amènent sous un autre angle. Quand ils allument mes lanternes par leurs connaissances. Quand leurs expériences me font réfléchir. Le doute n’est pas une faiblesse, mais une ouverture d’esprit et démontre une certaine flexibilité. Voire une sensibilité. Il ne faut pas voir le doute comme une perte de contrôle ou un manque de connaissances; mais plus comme une marque d’intelligence. Se questionner sur ses choix, faire le point, prendre le pouls des autres sont les premiers préceptes à toutes recherches qu’elles soient scientifiques ou créatives.
La certitude est l’ennemi #1 de la créativité. Il faut se méfier de celle-ci. Les certitudes sont des freins. Des barrières qui balisent l’inconnu. Et si l’inconnu, pour certains, c’est la crainte, pour le créateur c’est le terrain fertile qu’il recherche. Le risque de se tromper, certes, mais surtout de se surpasser. J’aime mieux me tromper que de ne pas essayer.
Quand je rencontre des professionnels, qu’ils proviennent de mon champ d’expertise ou d’ailleurs, je déteste quand ils me servent leurs salades d’affirmations gratuites coulées dans le béton. Les Grandes Vérités. Une bonne dose de savoir en canne. Les 101 trucs du vendeur averti. Confiance. Rigueur. Professionnalisme. Comme si le doute était une tare. De non-confiance. De non-rigueur. De non-professionnalisme. Moi, je vous dis que ce sont vos certitudes qui sont dangereuses. Car elles sont immuables. Comme un mur. La dernière fois que je suis rentré dans un mur, ça m’a fait mal. Maintenant je regarde le mur et je me demande comment je ferais pour le franchir, au lieu de rentrer dedans comme un bouc imbécile. Le doute c’est le contraire de l’affirmation « c’est prouvé! » que j’arbore tellement (lire ici). C’est l’antirecette. L’antimoule. Aux gens qui ont peur de passer pour faibles quand ils doutent, je leur dirais que ce qui est faible c’est d’affirmer n’importe quoi au lieu d’exprimer son ignorance de certaines questions auxquelles ils sont confrontés.
Je doute. Je doute de mes doutes. Je doute, donc je crée.
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Petit lexique de la compétition
À la suite de mon article précédent qui traitait des relations quelque fois difficiles avec la compétiton, je me suis amusé à créer un petit lexique rigolo pour vous aider, vous aussi, à mieux cerner vos concurrents. Ce lexique est applicable à plusieurs sphères d’activités et pourra vous aider à mieux diagnostiquer le marché. Je vous encourage à l’améliorer dans les commentaires. Veuillez noter que l’utilisation du masculin est présent uniquement pour alléger le texte et que les caractéristiques se partagent entre les sexes.
Le Trappeur
Ce profil de compétiteur est très particulier et facile à repérer : vous n’avez qu’à vous retournez, il est derrière vous. Il vous poursuit. Il renifle, tel un fox-terrier tous les endroits ou vous avez passé. Il est dans votre « trail » et cogne à la porte de tous vos clients systématiquement, lit votre blogue et consulte votre site internet quotidiennement. Son caractère malhabile lui fait faire quelques erreurs stratégiques comme laisser traîner des cartes d’affaires ou des documents chez vos clients. Vous avez un avantage majeur sur lui : puisqu’il vous suit, il est derrière vous.
Le Carbone
C’est toujours avec un sentiment partagé de flatterie et de haine que l’on considère ce compétiteur. Comme il copie tout ce que vous faites, vous êtes à la fois fier d’être son modèle et agacé du mérite qu’il vous vole. Il ne vous fauche pas qu’une idée, il vous prends tout votre talent, le temps que vous avez mis à développer et améliorer vore produit, pour en faire la plupart du temps du toc. Le problême se situe là. Le désavantage majeur du Carbone c’est qu’il se peut qu’on vous prenne pour lui; qu’on vous afflige du titre de copie alors que vous êtes l’original… L’avantage, c’est que pendant qu’il gruge son temps à vous copier, vous êtes déjà ailleurs à préparer sa prochaine tendance.
Le King
Facilement reconnaissable, le King est de toutes les associations inimaginables, membre de toutes les Chambres de Commerce de l’est du pays, Souper Bénéfice, acheteurs de billets compulsifs etc. Il est sapé à la dernière mode et n’a pas un poil de travers. Il court quotidiennement, fait du bénévolat, a une famille qu’il adore avec qui il passe du temps de qualité. Il est parfait et vous laisse toujours avoir l’air tout croche quand vous vous comparez. Comme son image est importante, il se tient toujours loin de la contreverse, surveille ses paroles, choisit ses partenaires avec parcimonie surtout quant à leur allégence politique et culturelle. Il est impeccable. Il s’avère donc, un compétiteur difficile. Le seul avantage que vous avez contre ce genre est l’humanité que vous dégagez. Sa stratégie de mise en marché est basé sur ses relations .
Le Toc
Le Toc c’est le King, tout en faux. Il a un peu l’air de qu’il avance, mais quand on gratte un peu, on se rend compte qu’il y a peu de chair autour de l’os. Une caractéristique très importante du Toc est le titre dont il s’affuble; sur sa carte d’affaires, on devrait y lire les mots président-directeur-général même s’il travaille seul. Son titre est souvent plus important que sa fonction. Comme si par magie, le fait d’inscrire ces lettres de noblesse lui confrairait le talent et l’expertise. Ses clients sont souvent déçus et se sentent bernés par le livrable. Il se peut qu’il vous compétitonne. Bien qu’il demeure l’un de vos compétiteurs, le Toc se fait lui-même compétition.
Le Nec Plus Ultra
Partageant beaucoup de traits caractéristiques avec le King, il est selon moi encore plus redoutable. Sa compréhension et sa sensibilité jouent en sa faveur surtout quand il cherche à convaincre un client du sexe opposé. Très difficile d’y chercher des poux, le Nec Plus Ultra a peu d’ennemis, plusieurs amis et passe bien chez les clients. Comme il est gentil, on perd la face rapidement vis à vis ses clients quand on le dénigre. À éviter. Caractéristique majeure: quand vous le rencontrez, il vous félicite pour votre beau travail… et est sincère! Quand je vous disais qu’il est difficile à tasser…
Le Saule Pleureur
Le Saule porte tout le sort du monde sur ses épaules. L’écomomie lui fait mal, la compétion lui fait mal, la température lui fait mal, etc. Bref, y a jamais rien qui va bien. Quand tu le rencontres, il a les yeux cernés, les traits tirés et sort toujours d’un conflit avec un client et ou fournisseur. À tout les coups, il vous ressasse qu’il n’a pas choisi le bon métier, que l’économie va mal, que la compétition, etc.. Vous avez compris. La misère du monde ne peut lui être atrribuée, mais il en est toujours la victime. C’est à se demander pourquoi, il a choisi un tel métier. À éviter comme la peste; votre bonheur lui semblera suspect et vous risquez de vous trouvez un tantiner niais, tel un Forest Gump quand vous comparerez ses malheurs aux vôtres.
La Vipère
Ce type de concurrent croque tout ce qui bouge. Il brûle les champs sur son passage, ne laisse aucun survivant et dénigre à la vitesse de la lumière. Il déteste ses semblables, rêve d’être seul sur terre et ainsi être considéré comme le meilleur. Sa haine de la concurrence se traduit par une multitudes d’actes perfides envers celle-ci. Il annonce à vos clients qu’il sont quasi imbéciles de traiter avec vous. Il partage avec Le Saule le drame que la compétition existe, sauf que lui tire comme un forcené sur celle-ci. Les clients ont souvent tendance a fuir La Vipère, surtout quand celle-ci dans sa haine aveugle parle de sa propre clientèle en termes peu flatteurs. Vous aurez un jour ou l’autre affaires avec ce type de concurrent, même si vous ne l’êtes pas, faites comme Le Nec Plus Ultra et félicitez-le sur son bon travail (même si vous ne le pensez pas…); il aura peut-être moins le réflexe de vous comptez parmi ses prochaines victimes…
Le 007
Subtil, gentil et courtois, le 007 est le James Bond de la compétition. Il vous talonne comme le Trappeur, mais beauoup plus subtilement que celui-ci. Sous ses allures d’ange, il cherche à connaître vos clients, vos fournisseurs, vos honoraires, etc. C’est un espion qui pense que la clé du succès en affaires passe par la connaissance accrue de ses conccurents. On pourrait facilement le confondre au Renard de Lafontaine, cherchant à vous ensorceller et connaître vos secrets pour ainsi récupérer vos clients, tel un fromage, aussitôt que vous ouvrirez la bouche comme le Corbeau…
Le Marathonien
Ce qui intéresse ce compétiteur, c’est sa perfromance personnelle. Il se fout de la compétition, il sait qu’elle est présente et qu’elle court autour de lui, mais il ne s’en sert pas pour guider ses pas. Il est le maître de sa destinée. Bien heureux dans sa course (marché), il agit au battement de son coeur (son expertise) et aux messages que sont corps (son client) lui transmet. Il est son propre baromêtre et ses décisions sont prises par et pour lui. C’est un compétiteur redoutable car il est difficile à prévoir. Il peut s’avérer compliqué à suivre, surtout si vous n’avez pas la forme…
La Girouette
Il est drôle ce conccurent et la stabilité n’est pas sa grande qualité. Il change au gré du vent. Un jour, il est rouge, le lendemain jaune, les modes ont une emprise incroyable sur sa façon de faire des affaires et son offre est très vague et indéfinie. Comme il change constemment, il vous compétitionne un jour et vous pouvez être des mois sans en attendre parler. Bien qu’il est certain d’être au goût du jour, il est sûr de lui jusqu’à ce qu’il change de cap. Toujours assuré d’être de la partie. Ses compétiteurs ont de la misère à le suivre et c’est normal, lui aussi en est incapable… C’est pour cette raison que ses clients ont de la misère à le mettre dans une case et sont déstabilisés par ses mouvements pas toujours logiques. Offre indéfinie, clientèle indéfinie.
Le Tit-Jeune
Le Tit-Jeune a tout vu, sait tout et a l’impertinence de la jeunesse. Son discours sent la formation non digérée. Sa candeur peut être agréable, mais sa vision des choses manque un peu de maturité. Sa jeunesse le force à couper les prix afin de se faire connaître; ce qui lui cause un tort irréparable quand son exprience est acquise puisqu’il a habitué ses clients à une facturation plus modeste. Il faut se méfier de la jeunesse car elle peut être synonyme d’un trop grand renouveau.
Le Tit-Vieux
Le Tit-Vieux a tout vu, sait tout et a l’impertinence de la maturité. Son discours sent la boule à mite non renouvellée. Son âge mûr peut rassurer, mais sa vision dépassée des choses manque de renouveau. Sa maturité le force à maintenir ses prix à un niveau égal à son expérience; ce qui lui cause un tort irréparable quand sa compétence désuette décoit ses clients. Il faut se méfier de la maturité car elle peut être synonyme de cliché.
> © Photo de Lyzadanger
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Pour en finir avec la compétition
Après mon billet sur Génération C, j’ai reçu un gentil courriel de sa réalisatrice, Annie Fournier me remerciant des bons mots que j’avais écrits sur son travail. On ne se connaissait que par amis ou clients communs et comme nous n’avions jamais travaillé ensemble, elle était surprise que j’aie parlé de ce projet de manière très positive, et ce, sans y avoir été mêlé. Je lui ai répondu que j’avais appris avec les années que donner du mérite aux autres ne t’enlevait rien personnellement, et qu’au contraire, ça te donnait plus de crédibilité quand tu dénonçais ce que tu trouvais moins bon.
Dans une autre vie, j’avais une relation malsaine avec mes compétiteurs; je les dénigrais, leur enlevais leurs mérites et était incapable de voir du positif dans leur travail, même quand ceux-ci le méritaient. J’imagine que ça venait avec ma verte jeunesse ou de mauvaises influences. Qu’importe. Je n’ai plus aucun sentiment négatif vis-à-vis mes compétiteurs maintenant; j’ajouterais que j’aime bien les rencontrer dans des activités d’affaires afin d’échanger sur le métier ou sur la vie en général. J’y vois une façon de tisser des liens qui peuvent servir un jour ou l’autre et de faire, ma foi, des rencontres très intéressantes. La vie est si longue… en affaires; couper des ponts, se faire des ennemis inutiles la rend seulement moins agréable à vivre. D’ennemi (sic!) un jour, on peut devenir partenaire sur des projets, ou simplement partager le même client, à combler des besoins différents. C’est plus facile à réaliser quand un contexte de mutuel respect est mis en place.
Ce n’est pas aussi facile pour tout le monde. Dans un dossier réalisé il y quelques années, je devais superviser une entreprise dans une démarche très précise de sollicitation. Dans ce mandat, je devais analyser les communications et élaborer un plan de visibilité. L’année précédente, le client avait déjà créé, avec un concurrent à moi, sa toute nouvelle plateforme graphique et la plupart de ses besoins étaient comblés dans ce domaine. J’avais deux excellentes raisons de ne pas y toucher. La première était que je considérais que le travail était bien fait et que deuxièmement, je pouvais prendre le budget total pour diffuser les messages. Nous avions convenu, le client et moi, que l’on ferait quelques corrections mineures dans les documents imprimés, tels que des changements de dates et des informations qui n’étaient plus à jour. Comme je pilotais le dossier, j’ai décidé de m’en occuper et de parler directement à ses créateurs. Erreur. La boîte de pub, responsable du dossier, ne voulait rien savoir de « dealer » avec un compétiteur (moi)… et ne voulait que parler au client. Même si j’argumentais à sa chargée de compte que je pouvais parler au nom du client, elle refusait en me demandant pourquoi je sollicitais « SON » client? Je lui fis remarquer que « SON » client était aussi « MON » client… Ce qu’elle refusa d’entendre. J’étais estomaqué. Aucun de mes arguments ne pouvait la convaincre. J’eus beau lui expliquer que j’avais suggéré au client de garder tout le travail qu’elle avait réalisé parce qu’il était bien fait; alors que j’étais en position de force et que j’aurais pu trouver l’argumentation nécessaire pour la sortir du dossier et recréer les pièces depuis le début, mais que je considérais que c’était malhonnête et mal servir NOTRE client. Rien n’y fit.
La notion d’appartenance d’un client, dans ce cas-ci et la plupart du temps, est un peu ridicule. À moins d’avoir des contrats en bonne et due forme (et encore là…), le client est toujours libre et n’appartient à personne. Il est libre de travailler avec qui il veut. J’ai partagé des clients avec plein de boîtes; le résultat est toujours surprenant. Certains sont mal à l’aise d’apprécier le travail de l’autre, d’autres tentent de tirer toujours sur la couverte pour en avoir plus et certains cherchent la petite chose qui nuira à son compétiteur… alors que d’autres permettent une grande ouverture afin de réaliser le mandat dans les meilleures conditions. C’est la meilleure façon. Tout le monde y gagne tellement. Surtout « TON » client.
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Le pouvoir au peuple.
Je suis passé en coup de vent chez mon client Chlorophylle pour discuter t-shirt avec la responsable de la collection, Katy Bond. Alors que je m’apprêtais à partir, je suis allé faire des coucous à Josée et Jay au département marketing. On a discuté du sujet de l’heure en branding sur les interweb: le nouveau / déjà dépassé logo de Gap. Pour ceux qui ne sont pas au courant, la chaîne de vêtements Gap a effectué un 180 degrés fulgurant par rapport à son identification visuelle. Après avoir annoncé un changement majeur de logo, elle a dû revenir sur sa décision quand la communauté internet en a décidé autrement. En quelques jours, les internautes du monde entier via Facebook et Twitter se sont mis à « basher » le logo avec une telle rage que la compagnie n’a eu le choix que de plier l’échine et de renoncer à son projet, préférant revenir à l’ancien plutôt que de courir le risque que la hargne ne se traduise par un recul de sa marque. Jay, fan des réseaux sociaux, mentionnait qu’il trouvait extraordinaire la force dissuasive émise par les internautes en la qualifiant « de pouvoir au peuple ». J’ai argumenté et émis quelques bémols là-dessus et profitant d’une course à Jonquière, je me suis mis à réfléchir sur le sujet. Je suis partagé sur ce fameux « pouvoir » surtout quant à sa perspicacité. Je vous fais part de mes réflexions… plutôt dures sur la notion de masse.
Le peuple n’aime pas le changement.
Les modes prennent toujours un certain temps à se rendre au public en général. En fait, quand la majorité du monde décide de l’adopter, les précurseurs sont déjà depuis longtemps rendus ailleurs à créer la prochaine. Alors que la majorité se vautre dans ce qu’il croit être la tendance, les early adopters regardent d’un oeil désabusé ce que la majorité prend comme « la » mode. C’est un cercle infini, alors que le monde en général suit la mode (passée), il jugent ceux qui fabriquent la prochaine… oubliant qu’ils l’endosseront, eux aussi, plus tard. La plupart des gens sont confortables dans la norme. Si tout le monde le fait, c’est que c’est bon. Et comme une masse ne bouge pas aussi facilement, le groupe préfère la stabilité au changement. La routine rassure. Bref, les gens n’aiment pas les événements qui bouleversent leur quotidien. Chaque fois que Facebook améliore certaines fonctionnalités de son réseau, on voit apparaître des groupes de protestations. Quand Hotmail annonce une nouvelle interface, on proteste. Quand on améliore le goût ce certains produits d’usage régulier, que l’on change son emballage ou son nom, les entreprises concernées sont toujours à risque de se faire critiquer. Le peuple n’aime pas le changement.
Changer les paradigmes du peuple est difficile, long et fastidieux. Une pub géniale d’Apple (Think Different) rendait hommage à ces êtres géniaux qui ont su changer le monde petit à petit grâce à leurs connaissances et leurs grandes volontés. Il faut avoir la couenne dure pour en arriver là. Si cette espèce rare de personnes n’existait pas, la plupart de nos vies seraient différentes.
Le peuple nivelle par le bas.
La facilité aura toujours l’avantage sur le labeur. La masse préfère s’amuser au lieu de travailler. Il en va de même avec ses loisirs. Si la télé demeure aussi populaire par rapport à la lecture, par exemple, c’est que pratiquer la dernière demande une certaine dose d’effort et de compréhension. S’écraser devant son téléviseur demande rarement un effort intellectuel, à moins d’écouter des émissions à contenu — encore ici, s’il faut se fier aux écoutes de la masse, les programmes préférés sont ceux qui ne font pas partie de cette catégorie.
La fibre syndicale qui veut que le maillon le plus faible de la chaîne fixe le niveau est encore un bel exemple que le peuple n’a pas tendance à vouloir viser l’amélioration. Les demandes syndicales sont la plupart du temps unidirectionnelles.
S’il fallait se fier au peuple pour avancer, ça se ferait à pas de tortue. Il faut des individus pour traîner le peuple. Il ne le fait jamais par lui même. Je prends souvent l’exemple de la musique, mais ce que l’on entend dans les radios commerciales est uniforme et inodore pour plaire au plus grand nombre de personnes. Il faut du cran pour découvrir des nouveaux sons; ça prend de l’ouverture. Quand le meilleur vendeur de disques du Québec est Sylvain Cossette et ses reprises 70′ s, le peuple a de sérieuses questions à se poser vis-à-vis sa possibilité à se réinventer et d’évoluer.
Le peuple vs l’individu.
Ce qui me dérange dans la notion de masse, c’est le partage de la pensée unique. La voix du peuple. J’aime penser qu’un individu peut à lui seul changer tout ça; tel un Henry Fonda dans 12 hommes en colère, où il réussit le tour de force de changer une à une les opinions d’un jury auquel il participe. Hélas, le contraire est plus souvent la norme : le peuple a le contrôle sur l’individu. Le mouvement de masse est plus facile à suivre que de le prendre à contre-courant. Plus facile et plus rassurant. C’est à ce moment que la subtilité individuelle se fond à la masse formelle du peuple. Si vous mélangez toutes les couleurs disponibles, vous arriverez à créer un gris uniforme. Rien de bien excitant, vous en conviendrez. Quand le peuple dicte ce qui est bon pour l’individu, celui-ci ajoute du gris à sa couleur personnelle, il devient moins différent, il s’efface au profit des autres.
Mon peuple est plus fort que le tien.
C’est fou comment un individu sans opinion en a une très franche quand elle est celle du peuple à qui il appartient. Comment un individu peureux devient téméraire quand il a l’appui de ses pairs. Comment le peuple donne du pouvoir. Dans la rue parmi des milliers de manifestants, l’individu est invincible. Hors du cocon, quand on lui demande de s’affirmer, l’individu est pas mal moins fringant…
Le peuple aime le peuple.
Le peuple aime croire qu’il a raison. Que puisqu’il est la norme, il est celui qui dicte le ton et qu’il faut suivre à la lettre ses recommandations. Le peuple n’aime pas la dissidencence, elle est source de conflit inutile. Quand le peuple voyage à l’étranger, il trouve que les autres peuples ne sont pas comme lui. Le peuple aime que le peuple lui ressemble. Le peuple aime le peuple.
Le peuple avait raison de s’en prendre au nouveau logo de Gap? Peut-être. Mais il ne l’a pas fait pour les bonnes raisons.
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MAJ
Suite au commentaire de Martin, j’ai décidé d’en ajouter un brin…
Le peuple aime suivre le peuple
Un lemming. Un mouton. Le peuple est un mouton. Un suiveux, comme on dit. Le peuple aime embarquer dans les histoires que le peuple lui dicte. Comme un lemming. Et si cette histoire de logo était un leurre? Comme le suggère si judicieusement mon buddy Martin dans son commentaire, un leurre orchestré par Gap pour permettre au peuple de s’approprier la marque; ça viendrait corroborer cette théorie. First, le fait que Gap recule aussi rapidement et facilement sur leur décision est quelque peu louche – on parle ici d’une méga corporation / on parle aussi d’une mega agence de pub (Laird and partners) ; secundo, ça ne serait pas la première fois que le peuple tombe dans le vide comme les lemmings du jeu qui suivent leurs semblables. Ça ne serait surtout pas la première fois que l’on utilise les réseaux sociaux à de fausses fins propagandistes. On peut se rappeler le blogue du Bixi, avec ses « faux » blogueurs. Bref, si c’est le cas, le peuple aurait droit à une fausse victoire et Gap, à une belle campagne la peignant comme une compagnie à l’écoute de sa clientèle.