Pour en finir avec la compétition

Après mon billet sur Génération C, j’ai reçu un gentil courriel de sa réalisatrice, Annie Fournier me remerciant des bons mots que j’avais écrits sur son travail. On ne se connaissait que par amis ou clients communs et comme nous n’avions jamais travaillé ensemble, elle était surprise que j’aie parlé de ce projet de manière très positive, et ce, sans y avoir été mêlé. Je lui ai répondu que j’avais appris avec les années que donner du mérite aux autres ne t’enlevait rien personnellement, et qu’au contraire, ça te donnait plus de crédibilité quand tu dénonçais ce que tu trouvais moins bon.
Dans une autre vie, j’avais une relation malsaine avec mes compétiteurs; je les dénigrais, leur enlevais leurs mérites et était incapable de voir du positif dans leur travail, même quand ceux-ci le méritaient. J’imagine que ça venait avec ma verte jeunesse ou de mauvaises influences. Qu’importe. Je n’ai plus aucun sentiment négatif vis-à-vis mes compétiteurs maintenant; j’ajouterais que j’aime bien les rencontrer dans des activités d’affaires afin d’échanger sur le métier ou sur la vie en général. J’y vois une façon de tisser des liens qui peuvent servir un jour ou l’autre et de faire, ma foi, des rencontres très intéressantes. La vie est si longue… en affaires; couper des ponts, se faire des ennemis inutiles la rend seulement moins agréable à vivre. D’ennemi (sic!) un jour, on peut devenir partenaire sur des projets, ou simplement partager le même client, à combler des besoins différents. C’est plus facile à réaliser quand un contexte de mutuel respect est mis en place.
Ce n’est pas aussi facile pour tout le monde. Dans un dossier réalisé il y quelques années, je devais superviser une entreprise dans une démarche très précise de sollicitation. Dans ce mandat, je devais analyser les communications et élaborer un plan de visibilité. L’année précédente, le client avait déjà créé, avec un concurrent à moi, sa toute nouvelle plateforme graphique et la plupart de ses besoins étaient comblés dans ce domaine. J’avais deux excellentes raisons de ne pas y toucher. La première était que je considérais que le travail était bien fait et que deuxièmement, je pouvais prendre le budget total pour diffuser les messages. Nous avions convenu, le client et moi, que l’on ferait quelques corrections mineures dans les documents imprimés, tels que des changements de dates et des informations qui n’étaient plus à jour. Comme je pilotais le dossier, j’ai décidé de m’en occuper et de parler directement à ses créateurs. Erreur. La boîte de pub, responsable du dossier, ne voulait rien savoir de « dealer » avec un compétiteur (moi)… et ne voulait que parler au client. Même si j’argumentais à sa chargée de compte que je pouvais parler au nom du client, elle refusait en me demandant pourquoi je sollicitais « SON » client? Je lui fis remarquer que « SON » client était aussi « MON » client… Ce qu’elle refusa d’entendre. J’étais estomaqué. Aucun de mes arguments ne pouvait la convaincre. J’eus beau lui expliquer que j’avais suggéré au client de garder tout le travail qu’elle avait réalisé parce qu’il était bien fait; alors que j’étais en position de force et que j’aurais pu trouver l’argumentation nécessaire pour la sortir du dossier et recréer les pièces depuis le début, mais que je considérais que c’était malhonnête et mal servir NOTRE client. Rien n’y fit.
La notion d’appartenance d’un client, dans ce cas-ci et la plupart du temps, est un peu ridicule.  À moins d’avoir des contrats en bonne et due forme (et encore là…), le client est toujours libre et n’appartient à personne. Il est libre de travailler avec qui il veut. J’ai partagé des clients avec plein de boîtes; le résultat est toujours surprenant. Certains sont mal à l’aise d’apprécier le travail de l’autre, d’autres tentent de tirer toujours sur la couverte pour en avoir plus et certains cherchent la petite chose qui nuira à son compétiteur… alors que d’autres permettent une grande ouverture afin de réaliser le mandat dans les meilleures conditions. C’est la meilleure façon. Tout le monde y gagne tellement. Surtout « TON » client.

3 commentaires

  • 21 octobre 2010 at 7:58 //

    Allo Marc,

    Tes propos consolident un point déjà bien évident pour moi… Partons du fait qu’il est impossible de vouloir détenir le monopole, ce qui en plus, ne doit jamais devenir l’objectif d’une «boîte» quelque soit son envergure et sa qualité de production. Donc, laisser la chance aux autres de prendre leur part dans un objectif commun, celui de donner le meilleur de nos compétences et ainsi, combler la satisfaction du client, qui comme tu le dis, ne nous appartient pas… s’il est pleinement satisfait, il te restera fidèle.

    Je prends ma retraite en décembre et il se pourrait que je délaisse complètement cet univers que j’ai adoré. Pourquoi? Pour entre autre laisser aux autres la chance de vivre ce petit bonheur presque quotidien que nous connaissons dans la création.

    D’autres défis m’attendent!

    Au plaisir de te lire encore

    Henriette

  • Henriette, c’est du bonheur de lire : « … la chance de vivre ce petit bonheur presque quotidien que nous connaissons dans la création ». Tu as tout a fait raison. Je travaille jusqu’à 12h par jour quelquefois, la fin de semaine, et je rentre à la maison le sourire étampé dans la face. Je ne changerais de vie professionnelle avec personne. Pour la fidélité du client, c’est plus complexe; j’ai écrit un billet là-dessus que je placerai sous peu…

    Que tes prochains défis te comblent!

  • 22 octobre 2010 at 12:18 //

    Marc, que de sagesse as-tu acquérit avec les années! Ce que tu dis est vraiment la ligne de pensée que j’aimerais adopter si j’avais à travailler pour moi. C’est tellement ça! Et moi aussi un jour j’ai déjà travaillé dans un environnement du genre, et j’ai quitté parce je ne me sentais pas à l’aise avec tout ça 😉

    À bienôt.

    Josée

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