Loin des yeux, loin du coeur.
Anecdote. Je suis en fin de location automobile. Il me reste quelques jours à rouler avec ma voiture et je devrai la ramener au garage. Comme il est le cas pour la plupart des locataires, j’ai dû suivre une série de procédures telles qu’une inspection en règle avant la fin de mon bail. Le mec qui l’a réalisé venait d’une firme indépendante et professionnelle, il était assez sympathique et très consciencieux; il m’a contacté, a pris rendez-vous et a scruté mon véhicule une bonne demi-heure, prenant notes et photos. Bref, après son examen attentif, il m’a fourni une adresse internet par laquelle je pouvais voir et surtout quantifier l’acuité de son travail. Je trouvais ça full 2.0. Assis devant mon ordi, après avoir entré mon numéro de dossier ainsi que mon numéro de série, j’étais en mesure d’avoir le montant que je devais à mon locateur : 680 $. 680 $ (avant taxes) ! Mon auto a à peine trois ans, 37 000 km, nickel, mais on me demandait quand même 680 $ avant de leur remettre… Je trouvais ça ordinaire et abusif. Alors, j’ai décidé d’appeler mon locateur, comme le veut la procédure. Après avoir choisi la langue dans laquelle je voulais que l’on s’adresse à moi, traversé le répertoire téléphonique jusqu’à mon choix, j’ai enfin pu parler à une responsable de la clientèle de mon constructeur automobile. J’expliquai que je venais de prendre note de mon inspection et que je n’étais pas tout à fait d’accord avec ses conclusions. Avec mon interlocutrice, nous passâmes point par point le document, pour en arriver à deux conclusions bien différentes. Elle considérait chacun des points valables et non négociables. De mon côté, je contestais 6 points sur 8. La plupart de nos points en litige étaient, vous vous en doutez bien, des « piqures » à la peinture originale de l’automobile. À mon humble avis de consommateur et non de carrossier expérimenté, leurs demandes étaient trop sévères ; je m’obstinai en lui rappelant que je n’ai toujours conduit qu’en ville sur une route asphaltée, que je n’ai pas de chalet et que je n’ai roulé que 13 000 km par année. Rien n’y faisait. La représentante à la clientèle restait campée sur ses positions. De mon côté, le ton montait… **** Confidence : j’ai reçu de mon père des gènes très forts de revendicateur quand vient le temps de me farcir un mec ou une nana d’un service à la clientèle téléphonique… Vidéotron, Future Shop, mais surtout Bell ont goûté plus d’une fois à ma médecine… Voici ma procédure habituelle : 1. L’approche — a) je suis courtois et mets la table en exposant ma demande — b) si j’ai attendu une demi-heure après la ligne, je passe déjà en mode impertinent. 2. Réponse du préposé a) s’il me prend pour un con en me récitant des conneries (du genre de Bell : avez-vous branché votre modem?) je perds patience et demande de passer à une étape ultérieure et de parler à quelqu’un d’autre. b) si je sens que rien ne se passera avec la discussion malgré le ton du conseiller, je demande de parler à son supérieur. 3. Le supérieur — a) de par sa nature, il ou elle est déjà plus vivace, ne supporte pas la bousculade, mais a souvent des réponses plus tangibles et des arguments qui sortent du guide. C’est avec le supérieur qu’il faut négocier. (D’ailleurs, il m’arrive de demander directement un supérieur quand vient le temps de demander des trucs… Bon. Fin de la confidence **** Je disais donc que de mon côté, le ton montait. J’étais impressionné par le détachement total de mon interlocutrice; pour elle, le rapport faisait foi de tout. Elle ne voulait et ne pouvait pas faire quoi que ce soit pour baisser la facture. Et ce, malgré mes arguments, ma mauvaise foi, ma colère à peine dissipée devant un tel entêtement. Après avoir épuisé toutes mes ressources et mon venin, j’ai décidé de leur dire que plus jamais je n’achèterai ou ne louerai une voiture de cette marque en ajoutant que je voulais parler à son supérieur… À ma grande surprise, le mec qui m’a parlé était très courtois, non sans me donner raison, il m’a conseillé de téléphoner à mon concessionnaire régional et leur expliquer mon litige. Bon. J’y avais pensé, mais ce n’était pas dans la procédure de retour exigée par le manufacturier. J’étais donc dans l’obligation de raconter mon histoire une seconde reprise à un autre intervenant. À la différence que contrairement à la précédente, la réception fût directe, compréhensive et courtoise. On a discuté de certaines éventualités et nous avons convenu de nous rencontrer pour évaluer la situation. Résultat : aucune facture. Le gars a usé de sa tête et a réussi à ne pas appliquer bêtement une résolution, une procédure en tenant compte de mes arguments. Et ça m’a fait réaliser que c’est de cette unique manière qu’une entreprise peut réussir à performer malgré une concurrence mondiale venant d’Internet : en réussissant à s’adapter plus facilement, à sortir des conventions et de travailler dans le sens de son client. En offrant un service impec ‘. Tout ce que je demandais à mon interlocutrice à l’autre bout du fil … et du monde, c’était tout simplement ça : voir autrement que ce qui est écrit dans son guide de la clientèle. Mon représentant régional a tout de suite usé de bon sens. Et ne m’a pas uniquement réglé mon litige, mais plus important encore il m’a conservé comme client. Pas en me forçant par des contrats ou des rabais à l’achat, mais par une compréhension commerce / client impeccable. Y a pas une publicité, même la plus géniale qui soit, qui rivalise avec ça…
Jay
4 mai 2010 at 8:39 //
Là-dessus, ce qui me fâche, c’est que la compagnie réussit à facturer à des gens qui sont comme moi, moins revendicateur que toi. C’est donc, qu’il faut se tenir debout et « s’essayer » afin de ne pas tomber dans le trou noir vers lequel nous sommes allègrement dirigé quand nous tenons la main de l’entreprise qui nous accompagne.
Pierre Lévesque
5 mai 2010 at 18:46 //
À ton avis, quel est le pourcentage que perçoit le mec professionnel qui a inspecté ta voiture ?
marc
5 mai 2010 at 21:04 //
@ Jay
J’avoue que c’est ordinaire de devoir te battre pour gagner un dû… et les compagnies le savent. En placant des gens en premières lignes, capables de résiter aux attaques de sconsommateurs est très payant en bout de ligne…
@ Pierre
Excellent point Pierre! Cela m’a passé par la tête. J’ose espérer qu’ils sont rémunéré à l’acte et non au constat… Tu t’imagine le scandale si on apprenait le contraire?
Clef-re
6 mai 2010 at 18:08 //
Cékueffedé
Dany
10 mai 2010 at 11:32 //
Pour répondre à Pierre, les manufacturiers sous-traitent le service d’inspection de fin de bail, et sont effectivement payés à l’acte.
Aussi, depuis la crise financière de l’an dernier, les manufacturiers automobiles appliquent à la lettre les politiques de fin de bail. Ils sont donc moins tolérants que par le passé, et s’enfargent dans de petits détails sur lesquels ils auraient fermer les yeux il y a deux ans.
Marc tu as choisi la meilleur avenue en parlant à ton concessionnaire. Les discussions avec les manufacturiers sont souvent impersonnelles, alors que la meilleur oreille est tout près de toi, dans ta ville.
Allez, vas en paix !
marc
11 mai 2010 at 9:44 //
Dany, tu as effectivement raison. On parle ici d’un manufacturier automobile, mais on aurait pu choisir un autre marché et arriver aux mêmes conclusions : plus c’est loin, moins c’est personnel. Et tu sais quoi? C’est une excellente nouvelle pour les petites entreprises qui cherchent à se battre contre les plus grosses. La possibilité de créer des liens dans sa communauté, de servir le client comme une personne et non un simple numéro de série comporte des avantages énormes. En voulant suivre la procédure écrite, je me suis mis dans le trouble pour rien. J’aurais dû appeler directement « une personne » au lieu d’une entreprise…